Publié en 2000 et traduit en français en 2003, "Les lettres de Pelafina" est un recueil de lettres présent à l'origine au sein du roman "La Maison des feuilles" de l'écrivain américain Mark Z. Danielewski.
Ces lettres furent rédigées entre le 28 juillet 1982 et mai 1989 à l'asile psychiatrique Three Attic Whalestoe par une pensionnaire du nom de Pelafina.
Malgré la distance qui les sépare, Johnny, son jeune fils confié à une famille d'accueil, est tout ce qu'il lui reste.
Dans ses premières lettres, Pelafina tente de le consoler, lui dit toute la fierté qu'il lui inspire et l'encourage à se montrer fort. Un soutien indéfectible pour compenser l'absence.
Puis aux lettres enjouées, souvent rédigées à plusieurs semaines d'intervalle, succèdent les premiers doutes, les contradictions, les mauvais rêves, les pensées confuses, les supplications, la paranoïa vis-à-vis du nouveau directeur, les aveux de culpabilité, et surtout la peur d'être remplacée voire oubliée...
" Chaque fois que j'ai demandé à ton père ce qu'il voulait pour son anniversaire, il m'a répondu immanquablement de la même façon. Savais-tu qu'il s'était fait retirer son appendice ?
Il était jeune quand on le lui a enlevé.
Il me disait toujours pour plaisanter qu'il voulait le récupérer. C'était sa façon à lui de dire "rien".
En fait, c'était une invitation à lui offrir quelque chose qui excède l'horizon de son imagination et de son désir. Sa façon de dire moi.
Tout mon amour à mon petit qui a encore son appendice. Et peut-être d'autres." p.54
Bien que l'on devine que son fils lui répond parfois, le présent recueil ne contient que les lettres de Pelafina. Un choix qui laisse entrevoir une solitude d'autant plus criante que ces lettres sonnent tel des monologues désespérés.
Derrière cette plume exubérante et théâtrale se cache un profond besoin de se sentir aimée.
Ce lien qu'elle s'acharne à vouloir conserver avec son fils est peut-être encore la seule chose qui la raccroche à une certaine lucidité.
Mais l'on peut aussi s'imaginer à quel point son instabilité psychologique doit être un poids pour son fils, trop jeune sans doute pour comprendre ses appels à l'aide.
D'autant qu'en femme intelligente qui connaît le latin et les mythologies anciennes, Pelafina accumule les messages codés, pas toujours évidents d'ailleurs à décrypter pour le lecteur.
Dans le fond, comprendre chaque mot choisi par Pelafina n'est pas le plus important, tant l'auteur réussit avec talent à nous faire rentrer dans l'esprit de cette femme perdue.
Une femme qui perd pied au fil du temps, glissant peu à peu vers une folie qui la laisse seule avec elle-même.
" Aujourd'hui je me demande comment faire naître en toi l'ultime quiétude ? Tu es déjà né de moi une fois. Penser que je ne puis le refaire me déchire, à moins qu'une telle délivrance ne soit possible qu'en me délivrant moi de toi et non toi de moi.
Je ne sais pas. Mes projets sont de monstrueux marécages et mes efforts des eaux troubles. Tout ce que j'ai jamais voulu c'est te voir transporté, de joie, en un lieu agréable, sous une meilleure étoile; penché sur ton avenir loin de mon ombre épouvantable.
Certes j'ai failli. Je ne vois rien d'autre à dire. Rien d'autre à faire. Je n'ai rien. Je ne suis rien.
Seul mon amour pour toi dément ces mots. " p.98
Quelqu'un parmi vous a-t-il lu "La Maison des feuilles" ?
Wahoo, ça à l'air très fort comme texte !
RépondreSupprimerJe suis en train, justement, de lire la Maison des Feuilles. C'est très... dense :)
RépondreSupprimerJe suis en train de lire la Maison des Feuilles, justement ! Et c'est très... dense :)
RépondreSupprimerJe n'ai pas lu la maison des feuilles, mais ce recueil si me tente déjà bien. Je note !
RépondreSupprimerPlutôt dur, comme sujet.
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