"L'Adversaire" est un récit rédigé par l'écrivain français Emmanuel Carrère et paru en 2000.
Ce récit retrace des faits réels datant de 1993. Cette année-là au mois de janvier, les corps de l'épouse et des deux enfants de Jean-Claude Romand sont retrouvés calcinés suite à un incendie survenu dans la maison familiale. Le père de famille est entre la vie et la mort.
L'enquête révèlera que l'épouse et les deux enfants étaient déjà morts bien avant l'incendie, assassinés par Jean-Claude Romand, qui avait également tué le même jour ses parents.
En poussant les investigations, les enquêteurs mettent à jour les mensonges de toute une vie.
Liaison, fausse carrière, arnaques, la vie de Jean-Claude Romand était rendue à ce point insoutenable par l'usurpation d'identité et de biens qu'acculé par la menace de voir la vérité éclater au grand jour, il a préféré assassiner tous ses proches.
Condamné à la réclusion à perpétuité mais passible d'une libération au bout de 22 ans, il purge actuellement sa peine et pourrait sortir de prison en 2015.
A peine avais-je lu les premières pages que je ne pouvais déjà plus décrocher mes yeux de ce livre!
Tout comme l'auteur, j'ai cherché à comprendre comment l'existence de cet homme avait pu se résumer au fil du temps à ce tissu de mensonges, à cette machination qui pourrira bien d'autres vies que la sienne.
Comment peut-on tromper son monde, et surtout ses proches, pendant aussi longtemps sans attirer le moindre soupçon? Et comment fait-on pratiquement pour mener une double vie?
Je n'ose même pas imaginer l'organisation et la mémoire que doit exiger une telle entreprise...
Tout le monde s'est vu dupé et plumé, proches et moins proches, tous pensaient que Romand était un homme bien sous tous rapports. Respecté, il était perçu comme un homme gentil, calme, ayant bien réussi et qui avait la modestie pour qualité.
"En quinze ans de double vie, il n'a fait aucune rencontre, parlé à personne, il ne s'est mêlé à aucune de ces sociétés parallèles, comme le monde du jeu, de la drogue ou de la nuit, où il aurait pu se sentir moins seul. Jamais non plus il n'a cherché à donner le change à l'extérieur.
Quand il faisait son entrée sur la scène domestique de sa vie, chacun pensait qu'il venait d'une autre scène où il tenait un autre rôle, celui de l'important qui court le monde, fréquente les ministres, dîne sous des lambris officiels, et qu'il le reprendrait en sortant.
Mais il n'y avait pas d'autre scène, pas d'autre public devant qui jouer l'autre rôle.
Dehors, il se retrouvait nu. Il retournait à l'absence, au vide, au blanc, qui n'étaient pas un accident de parcours mais l'unique expérience de sa vie." p.101
Au départ il y eut un premier mensonge pour sauver la face. Ensuite le mensonge en a entraîné un autre. Il fallait sans cesse couvrir le précédent avec un nouveau qui tienne la route. Romand s'est ainsi construit une vie, des souvenirs, un diplôme de médecine, une carrière, un faux cancer tout en sachant que la vérité finirait bien par éclater au grand jour mais repoussant sans cesse l'échéance jusqu'à se retrouver au pied du mur.
Un mélange d'incompréhension et d'effroi m'a animée durant toute ma lecture. Pourquoi ne pas se suicider au lieu d'assassiner toute sa famille? Comment avoir réussi à faire preuve de tant de sang froid durant les meurtres pour ensuite se montrer si affecté durant le procès?
Plusieurs éléments de l'enquête et les pertes de mémoire de Romand tendent à faire penser que l'homme n'était pas une victime dépassée par ses mensonges mais un vrai manipulateur capable de tout pour arriver à ses fins. Le doute subsiste...
Pour construire son récit, l'auteur s'est basé sur la correspondance établie entre lui et Romand ainsi que sur les différents témoignages fournis au procès auquel il a lui-même assisté. Il s'est rendu sur les lieux de vie de cet homme si étrange et à partir des éléments dont il disposait s'est imaginé le quotidien de Jean-Claude Romand, disséquant chaque épisode de sa vie pour en souligner les contours.
Durant tout le récit, l'auteur ne juge pas l'homme mais tente de comprendre quel était son état d'esprit et comment il avait pu en arriver à se créer une fausse identité durant plus de 15 ans.
Le récit est narré du point de vue de l'auteur. Le ton est neutre même si l'on sent bien que Carrère est loin de cautionner les crimes commis par Romand.
Et l'auteur de conclure : " J'ai pensé qu'écrire cette histoire ne pouvait être qu'un crime ou une prière." p.220
Un récit troublant que je serais tentée de qualifier de "fascinant" moins en raison des mensonges de Romand (certains étaient quand même gros comme des maisons!) que pour la crédulité de l'ensemble de ses proches qui m'a laissée pantoise...
On m'a bien souvent répété qu'on ne pouvait jamais connaître réellement quelqu'un. Cette histoire de descente aux enfers est si bien racontée qu'elle a de quoi rendre parano (!)
"L'Adversaire" était une lecture commune avec Clara, que je remercie de m'avoir aidée à déterrer ce livre de ma terriiiiiible PAL!
D'autres avis : Lasardine - Orchidée
un de mes livres préférés. une lecture qui ne peut laisser indifférent.
RépondreSupprimerJ'ai beaucoup aimé ce livre, sauf le dernier chapitre qui semble une réhabilitation de ce type qui a quand même zigouillé de sang froid toute sa famille. Pourquoi est-ce qu'en ayant trouvé la foi il serait plus pardonnable ? Je n'aime pas ce genre de discours...
RépondreSupprimerJ'ai vu une adaptation, celle de Laurent Cantet, une vraie purge et en plus, il ne tue personne !
Cynthia, nos avis convergent !
RépondreSupprimer@ Ys : L'attitude de pardon concerne toutes les religions et nombreux sont les gens qui s'y engouffrent comme une excuse.
J'ai trouvé qu'Emmanuel Carrere a surtout voulu expliquer les positions et les motivations de chacun.
Moi j'avais bien aimé le film de cantet mais celui avec Auteuil aussi. Et maintenant Cunthia, tu dois ABSOLUMENT lire D'autres Vies que la Mienne du même auteur, une pépite!
RépondreSupprimerParano, c'est clair! C'est effrayant... effroyable aussi! J'ai lu ce récit il y a bien 6 ans et son souvenir est encore très vivace. Le genre de livre qui marque, vraiment...
RépondreSupprimerEt ce "docteur", difficile de lui jeter la pierre...
Comme Esmeraldae, un de mes livres préférés.
Il est dans ma LAL et il me tarde de découvrir cet auteur!
RépondreSupprimerLe sujet me fait trop peur. Je ne pourrai jamais lire ce livre je crois.
RépondreSupprimerPas tentée pour deux sous...
RépondreSupprimerUn roman juste énorme, dense et sans équivoque. J'ai beaucoup aimé et ai été plutôt choqué lors de ma lecture (ado).
RépondreSupprimerJamais lu mais je me souviens que ce livre avait été adapté au cinéma.
RépondreSupprimerBouhh pas tentée du tout !
RépondreSupprimerLe personnage est trop antipathique et ignoble pour que j'ai envie de lire et de comprendre sa vie...
Je n'ai pas aimé "La classe de neige" de cet auteur et depuis, je n'ai plus envie de rien lire de lui.
RépondreSupprimerMais c'est vrai que l'histoire de cet homme fait froid dans le dos !
Un sujet fascinant traité par quelqu'un de fasciné et qui en parle avec engouement. Oui, j'ai ADORE ! 'Un roman russe', aussi, rédigé comme un docu fiction. Prenant. 'La Classe de neige' est un récit plus convenu, même si le sujet l'est moins. C'est différent. Alors tente, Manu ;)
RépondreSupprimerTrès très tentée. Il faut juste que je trouve une petite place dans ma PAL.
RépondreSupprimerJe ne connais pas encore Carrère mais plus je lis sur lui et sur ses romans, plus je trouve cet auteur écrivain du réel attirant..
RépondreSupprimer@esmeraldae : Je n'irais pas jusqu'à placer cette lecture dans mes préférées mais je reconnais que Carrère est un très bon narrateur et que l'histoire ne peut laisser de marbre c'est certain!
RépondreSupprimer@Ys : Dans le dernier chapitre, il me semble que Carrère se contente (comme dans le reste du récit) de relater les faits à savoir que Romand s'est effectivement tourné vers la religion et qu'il est soutenu par quelques personnes dans cette voie.
Mais il est tout de même précisé que Carrère ne le cautionne pas.
Je n'ai pas vu d'adaptation et je ne suis pas sûre de vouloir en voir une :/
@Clara : oui effectivement ;)
@Valérie : ayant aimé la plume de l'auteur, je compte bien remettre ça et ce titre est effectivement sur ma top list ;)
@Marie-L : Je garderais certainement cette histoire en tête mais tout en faisant en sorte qu'elle ne perturbe pas trop mes relations avec les gens ;)
@Pimprenelle : bonne découverte dans ce cas ;)
@CécileQD9 : C'est vrai qu'en lisant ce livre, on ne peut pas s'empêcher de s'identifier aux proches et/ou aux victimes :/
@Choco : Parce qu'il s'agit d'une histoire vraie?
@Béné : J'imagine comme ce livre a du te marquer à l'époque...
@Lilibook : oui et c'est curieux mais avant de lire ce récit, je n'avais jamais entendu parler du film.
@Marie : je peux comprendre, je ne pense pas que je relirai ce livre, ou alors dans très longtemps!
@Manu : ah tiens, tu es la première que je lis qui n'a pas aimé "Classe de neige". Je vais me renseigner car je ne sais plus très bien de quoi il parle ;)
@DouceBelle : Carrère s'est beaucoup investi dans ce projet.
Il paraît même qu'il est tombé en dépression après la sortie du livre...
@Zarline : nous savons comment ça marche : "un de plus ou de moins" ^^
@Aurore : hé bien de mon côté, je suis bien tentée de poursuivre et je te le conseille ;)
Celui-ci aussi je l'ai dans ma PAL depuis longtemps déjà ! Je veux vraiment le lire, surtout que c'est plus une enquête qu'un roman. L'auteur repart sur les pas du meurtrier pour tenter de comprendre l'incompréhensible de la part des personnes extérieures ... Là encore, il me faudra trouver un petit moment pour le lire ! Mais ton billet m'y incite vraiment.
RépondreSupprimerJ'ai lu un autre billet sur ce livre hier. le tien est tout aussi convaincant. Je note le titre, à moins que je tombe pas hasard sur le film. On verra quel format croisera ma vie en premier.
RépondreSupprimerJ'ai lu "La classe de neige" de l'auteur il y a, quoi!?, presque 10 ans et ensuite je n'ai plus rien lu de lui. Pourtant ses autres romans m'intéressent! Je note celui-là!
RépondreSupprimerJe viens de l'acheter dans la nouvelle collection Folio cinéma : livre + dvd. Je commence par quoi ?
RépondreSupprimer@Nanne : Ce serait l'occasion, il y a justement un challenge Carrère qui circule chez Pimprenelle en ce moment ;)
RépondreSupprimer@Géraldine : Oui, Clara l'a apprécié autant que moi et je ne serais pas étonnée que ce soit ton cas aussi ;)
@Abeille : et moi je note "Classe de neige" car il semble faire l'unanimité ;)
@Anonyme : de manière générale, j'essaie de privilégier le livre avant le film ;)
oups ... je découvre ton billet sur ce livre avec beaucoup de retard ... et le lien vers moi par la même ....
RépondreSupprimercomme val je te conseille d'autres vie que la mienne
ce livre me tente beaucoup même si le sujet est terrible... Direction ma Lal!
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