En librairie depuis le 21 août, "La nostalgie heureuse" est un texte autobiographique de la romancière belge Amélie Nothomb, notamment auteure de "Stupeur et tremblements", "Le Voyage d'hiver" ou plus récemment de "Barbe bleue".
"La nostalgie heureuse" est le sentiment qu'éprouve Amélie Nothomb à l'issue de son retour au Japon en avril 2012, un pays dont elle fut arrachée à l'âge de 5 ans, qu'elle retrouve brièvement une fois diplômée (son expérience fut racontée dans "Stupeur et tremblements") et où elle n'avait plus mis les pieds depuis 16 ans.
Sollicitée pour un reportage, l'auteure revisite les lieux de son enfance en compagnie d'une équipe de télévision. Ce reportage - "Amélie Nothomb, Une vie entre deux eaux" - a d'ailleurs été diffusé sur France 5 l'an dernier.
A la joie des retrouvailles se mêle l'appréhension de confronter ses souvenirs à la réalité d'un pays malmené par le séisme de 2011 et de renouer avec Nishiosan - plus qu'une nounou, une mère de coeur - et Rinri, le fiancé autrefois éconduit et évoqué dans "Ni d'Eve ni d'Adam".
" Les retrouvailles sont des phénomènes si complexes qu'on ne devrait les effectuer qu'après un long apprentissage ou bien tout simplement les interdire."
Je me souviens encore très bien du reportage de France 5. De ce fait, je ne comprends pas trop l'appellation de "roman" utilisée pour qualifier "La nostalgie heureuse" car pour moi, il s'agit plutôt d'une incursion dans les coulisses de l'émission, voire d'un arrêt sur images commenté et augmenté de scènes coupées au montage.
Amélie Nothomb se livre ici sans filets et sans passer par le truchement d'un personnage.
L'enjeu de ce voyage était double. Non seulement elle allait revoir le Japon avec lequel elle vécut "une idylle parfaite", Nishiosan dont elle n'avait plus de nouvelles depuis le tremblement de terre de Kobe, et Rinri dont elle craint la réaction.
Mais elle espère également que ce retour aux sources lui fournira des preuves de son existence, de ce passé nippon tellement embelli par ses souvenirs d'enfant.
Arrivée sur les lieux, le choc est de taille. Le pays a visiblement perdu de sa superbe lors du séisme, et le quartier modeste de son enfance est devenu une banlieue chic.
" Je suis trop occupée à contenir mon coeur brisé. Plus un chagrin est banal, plus il est sérieux. Tout le monde connaît cette expérience cruelle. Découvrir que les lieux secrets de la haute enfance ont été profanés, qu'ils n'ont pas été jugés dignes d'être préservés et que c'est normal, voilà."
Les nouvelles images se heurtent aux souvenirs. La douleur liée au déracinement refait surface mais les repères d'autrefois semblent avoir disparu.
Heureusement, Nishiosan et Riri n'ont pas changé, ils ont simplement vieilli.
Les retrouvailles avec sa nounou sont déchirantes (elles m'avaient décoché une larme lors du reportage et ce fut pire cette fois-ci) et trop brèves, comme un ultime adieu. Avec Rinri, la romancière retrouve la complicité mais aussi "la gêne" éprouvée autrefois.
Il y aura d'autres visites : Kyoto "la plus belle ville du monde" aux dires de l'auteure, Tokyo et ses "cols blancs", Fukushima et sa centrale nucléaire fantôme.
Mais aussi un rendez-vous houleux avec son éditeur japonais.
J'ai d'ailleurs appris que suite à la parution de sa nouvelle "Les Myrtilles" dont les bénéfices furent reversés aux sinistrés du séisme 2011, le Japon - qui boudait ses livres depuis la parution de "Stupeur et tremblements" - avait recommencé à la traduire depuis...
Par contre, pas question de reparler de "Stupeur et tremblements".
J'ai beaucoup aimé ce petit voyage au pays du Soleil Levant, raconté avec beaucoup d'émotion, de modestie (elle évoque souvent son "japonais de cuisine") et de dérision (l'anecdote sur le bonsaî ressuscité par Martin Scorcese est des plus savoureuses, de même que sa réflexion au sujet des noms farfelus donnés à ses personnages).
Amélie Nothomb fait ici montre d'une capacité d'émerveillement et d'une sagesse contagieuses.
Si elle confesse être une nostalgique dans l'âme, elle nous invite néanmoins à prendre le passé pour ce qu'il est.
S'agissant du livre audio en lui-même, j'ai trouvé l'écoute fort agréable. Le texte, régulièrement entrecoupé de mélodies nipponnes, est mis en paroles par Cathy Min Jung, une lectrice d'origine asiatique.
Un choix judicieux sachant que de nombreux mots japonais parsèment le récit.
"La nostalgie heureuse" ravira certainement les fans. En revanche, je me demande si cette intimité partagée avec l'auteure intéressera les autres. Pour ma part, j'avoue avoir été conquise et j'ai ressenti moi aussi cette nostalgie heureuse de mon adolescence, largement bercée par les romans d'Amélie Nothomb et que je ne retrouvais pas dans ses précédents romans.
Si vous avez l'occasion de regarder le reportage avant, c'est encore mieux !
D'autres avis : Argali - Hérisson - Mango - Géraldine
Cliquez ici pour en découvrir un extrait audio
Je remercie les éditions Audiolib de m'avoir envoyé ce livre !
J'ai lu une fois cette cette auteure et ca m'a suffi ! Peut-être est-ce un tort de ma part.. Il faudra que je lui donne une seconde chance un jour:)
RépondreSupprimerJ'ai surtout aimé ses premiers, si ça peut t'aider :)
SupprimerJ'aime bien quand elle parle d'elle, j'avais été touchée par le reportage. Je le prendrai en version papier à la bibliothèque, rien ne presse.
RépondreSupprimerEn audio c'est pas mal non plus :)
SupprimerMon billet sur ce "roman" est sorti aujourd'hui aussi. J'ai lu ce livre avec grand plaisir!
RépondreSupprimerJe vais de ce pas lire ton billet :)
SupprimerJe la lis toujours avec plaisir mais cette fois, je suis restée sur ma faim. Elle en dit trop ou pas assez. Trop car c'est quand même un voyage et des sentiments très intimes qu'elle livre ainsi, pas assez car on voudrait en savoir plus, comprendre, partager davantage cette intimité.
RépondreSupprimerMerci pour le lien vers mon billet.
Déjà en audio livre ? Il ne faudrait pas laisser retomber le soufflé.
RépondreSupprimerIl faut que je tente de renouer avec Nothomb... Je l'avais adorée à ses débuts, puis détestée et depuis des années, je ne la lis plus...
RépondreSupprimerJe n'arrive pas à me faire au style de cette auteure... Du coup je ne la lis plus.
RépondreSupprimerPareil que Clara. Et pourtant, je l'ai lu au tout début, à son premier, quand elle n'était pas encore connue. Peut-être que je lirai "Stupeur et tremblements" un jour.
RépondreSupprimer