11 avril 2014

Le bruit de la gifle - Emmanuelle Urien


En librairie depuis le mois de janvier, "Le bruit de la gifle" rassemble 10 nouvelles de la française Emmanuelle Urien, notamment auteure du recueil "Court, noir, sans sucre" et du roman "L'Art difficile de rester assise sur une balançoire".

Tous les ans, Armand se rend sur la même plage pour rendre hommage à son oncle et sa tante noyés en mer et pour savourer sa solitude au goût de "Pain, beurre, chocolat".
"Le bruit de la gifle" ou la rencontre entre un homme et une petite fille réfugiée dans sa librairie.
Dans "Les pieds dans le plat", Violette Vireux se fait interroger par deux policiers à la suite de l'annonce du décès de son mari.
Sur un coup de tête et pour échapper au vide de sa vie, une femme abandonne son mari et ses enfants pour aller vivre dans la maison de sa tante, tout juste décédée.
Pas sûr qu'elle parvienne à échapper à la "Mécanique de l'attente".
"Têtes mortes". Par une froide journée d'hiver, un agent du Samu social découvre, parmi les 13 nouveaux sans-abris, une personne qu'il a bien connue et qu'il aurait toutes les raisons de ne pas aider.
Un fils songe à se débarrasser de son père dont la maladresse est telle qu'il a derrière lui un véritable "Tableau de chasse".
Isabelle ne veut jamais rien faire tant elle voit le mal partout. Son mari, à qui elle essaie toujours de "Faire porter le chapeau" sort se promener pour échapper à leur routine.
"Bateau sur l'eau". Pour se venger de cette femme dont il n'arrive pas à se faire aimer, un homme lui dérobe son précieux bateau et se retrouve à la dérive, largué en pleine mer.
"The sock issue" ou la complainte silencieuse d'une épouse, réprimandée par son mari parce qu'elle ramasse systématiquement ses chaussettes abandonnées au pied du lit.
Dans "Insulaire", un homme souffre que sa vie de couple soit rythmée par les lectures de sa femme, paralysée suite à une maladie, et qui ne le regarde plus.

" Rien. Je n'attends rien.
C'est un soulagement. Un repos mérité, du corps et de l'esprit, après tant d'années à donner - donner, et tenacement espérer recevoir quelque chose en retour. Reconnaissance, affection, amour.
Comme sur les prospectus mal orthographiés des marabouts de pacotille.
Sans doute ai-je eu mon lot de tout cela, au fil du temps.
Un fil tendu à craquer, toujours prêt à s'effilocher davantage, mais qui a tenu bon jusque là, bien qu'usé jusqu'à la corde.
Le lent secret des hommes est de vider celles qui les nourrissent, ils leur soutirent leur substance, leur arrachent leur âme, ne leur laissent en échange que des bribes, des miettes - les bas morceaux des sentiments. Tant de luttes, de répétitions dans le vide, le vague, pour un simple merci, un morne s'il-vous-plaît.
Tellement de concessions, d'orgueil ravalé ou de juste colère rentrée, pour un baiser, sur la bouche au début, puis qui file sournoisement vers la joue, pour finir par simplement vous effleurer le front, en habitude distraite.
La même habitude qui vous fait vous laver les mains en sortant des toilettes. 
Cette mécanique de l'indifférence est leur arme mortelle pour réduire la femme à néant." p.45

Ma dernière rencontre avec Emmanuelle Urien et son roman "L'Art difficile de rester assise sur une balançoire" s'était soldée par une impression très mitigée.
Lorsque j'ai appris la sortie de son dernier recueil, j'ai espéré y retrouver le même engouement qu'à la lecture de l'excellent "Court, noir, sans sucre".
Si j'ai aimé la plupart de ces nouvelles, j'ai trouvé leurs chutes moins brutales et donc moins marquantes que celles du précédent recueil.
Ou bien en attendais-je trop tôt et me suis-je habituée au style de l'auteure au point de deviner plus facilement ses intentions ?
Certes, l'auteure reste ici dans le même registre amer - lequel lui sied d'ailleurs fort bien - en proposant des personnages qui ressentent tous le besoin de se libérer de quelque chose ou de quelqu'un qui les pèse depuis trop longtemps.
Certains continueront d'encaisser là où d'autres orchestreront leur délivrance.
"Les pieds dans le plat" m'a plu, sans doute parce que calqué sur le génial "Coup de gigot" de Roald Dahl.
J'ai également apprécié "Tableau de chasse", "Têtes mortes", "Insulaire" aux chutes les plus "spectaculaires". Ce n'est pas que j'ai détesté les autres mais je constate qu'elles n'ont rien déclenché de particulier en moi.
J'espère que "Tous nos petits morceaux" encore dans ma PAL me comblera entièrement.
 

D'autres avis : Sylire - Cathulu - Daniel

MERCI aux éditions Quadrature de m'avoir envoyé ce recueil

6 commentaires:

  1. j'ai trouvé très inégales ces nouvelles surtout pour les chutes ( billet à venir un jour)

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    1. Oui j'ai trouvé aussi ! Difficile de faire aussi bien que son recueil "Court, noir, sans sucre"...

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  2. Une auteure que je ne connais pas encore mais généralement j'apprécie de découvrir un auteur par le biais de nouvelles. Pourquoi pas alors...!

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    1. Dans ce cas, je te conseille plutôt son précédent recueil "Court, noir, sans sucre", un régal !

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  3. Merci pour le lien vers mon billet sur ce livre! J'avais lu en son temps "La Collecte des monstres", qui recèle d'excellentes nouvelles à chute abrupte.

    Et j'ai toujours son premier roman sur ma pile à lire... il monte et il descend, le bougre! Il faudrait aussi que je lise "Court, noir, sans sucre", dont j'adore le titre.

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  4. Tentée pour cela :en proposant des personnages qui ressentent tous le besoin de se libérer de quelque chose ou de quelqu'un qui les pèse depuis trop longtemps.
    Certains continueront d'encaisser là où d'autres orchestreront leur délivrance. J'aime cette problématique chez des personnages.

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