17 mai 2012

Le Musée du Dr Moses - Joyce Carol Oates


Paru en français en mars dernier, "Le Musée du Dr Moses" rassemble 10 nouvelles parues dans différentes revues entre 1998 et 2006 et signées de l'écrivaine américaine Joyce Carol Oates, notamment auteure des romans "Délicieuses pourritures", "Viol, une histoire d'amour", "Premier amour" ou encore "Reflets en eau trouble".

Une séance de jogging dans un parc, un après-midi à la piscine, une sortie de prison, une visite à un fils, à un père, à une mère, à un ex. Un quotidien paisible ?
Croit-on...Mais le lecteur averti sait que les choses finissent toujours par se corser avec Oates, que le drame n'est jamais loin, qu'il existe entre tous les Hommes un rapport de victime à bourreau.
Mais sait-il pour autant à quoi s'en tenir ?
Car si entre les lignes se glissent subrepticement la vengeance, le chantage, la trahison, la violence, le meurtre, la perversion, la dépendance, la culpabilité, nul ne saurait déjouer le sort que réserve à ses proies cet ennemi tapi dans l'ombre et qui, sous les traits d'un enfant, d'un père, d'un amant, d'un mari, d'un proche, attend son heure pour frapper.

" Ils étaient des parents américains aisés et éduqués, ils feraient tout ce qui était humainement possible pour aider leur enfant, pour le rendre à la normalité de l'espèce.
Il est notre seul enfant. Nous l'aimons tant. Nous ne comprenons pas. Nous sommes innocents. Ce n'est qu'une phase, une phase de croissance. Ce n'est plus un bébé. Qu'y pouvons-nous ? Il s'est noyé, ce qui était humain en lui s'est noyé. Ce qui est humain a disparu. Ce qui était nôtre a disparu. Où cela ?" p.152

Jamais dans ces nouvelles, il ne sera question de transigeance, de remords, de pardon et encore moins de rédemption.

" Rien ne nous déroute davantage que d'être haï par quelqu'un. Nos propres haines secrètes, elles, nous paraissent si naturelles. Si inévitables." p.39

L'auteure ne fait pas dans la demi-mesure, n'épargnant rien à ces êtres, ces couples, ces familles décimées par ce qui ressemble à un cauchemar interminable.
Et toujours en toile de fond, cette Amérique rude, insécurisante, corrompue, ces décors marécageux, hostiles, ces espaces fétides, étouffants, flottants entre vie et mort.

Parmi mes nouvelles préférées : "Surveillance antisuicide" et "Les jumeaux : un mystère" (Lili Galipette, je serais curieuse de connaître ton avis sur ce texte :)) qui mêlent atrocement manipulation et filiation, "Gage d'amour", récit d'une implacable vengeance, et "Le Musée du Dr Moses" qui reprend ce thème cher à Oates de l'ambivalence affective, de ce troublant mélange de magnétisme et de répulsion éprouvé pour un seul et même être.
Hormis "Dépouillement" (auquel je n'ai strictement rien compris) et "Fauve" (dont la fin fantastique m'a laissée perplexe), j'ai été fascinée/épouvantée/angoissée par ces portraits sombres révélés par le drame et qui décryptent toute la folie des hommes.

Non non, ne pas aimer les nouvelles ne devrait pas vous détourner de ce recueil (coucou Manu :))

" Cette femme en particulier, je ne voulais pas lui faire de mal. Je pleurais dans ses bras et elle pardonnait ma faiblesse. Comme les femmes pardonnent la faiblesse si c'est un pont pour leur force." p.172

L'avis de Mango

27 commentaires:

  1. Et en plus elle a le temps d'écrire des nouvelles? Je pense que Oates n'a pas les mêmes besoins en sommeil que le reste de l'humanité... Quelle production!

    RépondreSupprimer
    Réponses
    1. 400 nouvelles, 80 romans, des essais, de quoi laisser songeur en effet...

      Supprimer
  2. Réponses
    1. Ah je serais vraiment très curieuse de connaître ton avis :)

      Supprimer
  3. C'est un phénomène mais je ne m'en lasse pas et je viens de prendre encore un autre Oates, hier: Le Ravin où elle est ditesur la couverture: "alias Rosamond Smith". Je ne savais pas qu'elle écrivait aussi sous des pseudos!

    RépondreSupprimer
    Réponses
    1. Oui, elle écrit des thrillers sous différents pseudos - moins bons que les textes écrits sous son vrai nom dit-on mais pour ma part, j'ai beaucoup aimé "Coeur volé" de son pseudo Lauren Kelly et j'attends donc d'en lire d'autres avant de me prononcer sur la supposée différence de qualité littéraire :)

      Supprimer
  4. Pour Joyce Carol Oates, je peux passer outre mon manque d'intérêt envers les nouvelles ;-)

    RépondreSupprimer
    Réponses
    1. Et tu as bien raison, j'attends donc ton billet sur ce recueil ^^

      Supprimer
  5. Réponses
    1. Ah son univers est particulier c'est certain et je comprends que tout le monde n'y adhère pas ;) Il faut aimer le sombre tendance glauque ;)

      Supprimer
  6. A noter, incontestablement, même si j'ai une quinzaine (ou plus !) de livres de J C Oates en retard ! ;-)

    RépondreSupprimer
  7. Une auteure avec laquelle j'ai du mal. Je la trouve parfois très bonne, parfois son style est un peu lourd.

    RépondreSupprimer
    Réponses
    1. Pour l'instant je n'ai eu qu'une déception avec "Reflets en eaux troubles" mais je n'ai lu que ses courts romans et ce recueil de nouvelles, je changerai peut-être d'avis en passant à ses romans plus denses...

      Supprimer
  8. Décidément, il va falloir que je découvre cette auteure, avec tout le bien que j'en lis sur ton blog et sur d'autres...

    RépondreSupprimer
    Réponses
    1. Il faut au moins essayer une fois :) Après on accroche ou on n'accroche pas... Mais il est vrai que pour le moment j'aime beaucoup ce que je lis d'elle

      Supprimer
  9. Celui là, il me le faut absolument !

    RépondreSupprimer
  10. Je l'adore ! Ses nouvelles sont fabuleuses. (ses romans aussi !) Celui-ci manque à ma PAL. Il est urgent d'agir :-)

    RépondreSupprimer
    Réponses
    1. Ah oui si tu es fan, il y a effectivement urgence :P

      Supprimer
  11. Ah, il me les faut, ces nouvelles !!!! Oates est abominable, tout est si noir... mais quel délice de la lire !

    RépondreSupprimer
    Réponses
    1. Oui ses univers sont très troublants, je les compare toujours à des films d'horreur que l'on regarde les mains sur les yeux, les doigts légèrement écartés :) Fascinants et malsains à la fois.

      Supprimer
  12. Réponses
    1. Ah comme je le disais plus haut, il faut au moins tenter une fois l'expérience :)

      Supprimer
  13. Depuis que j'ai lu "Les femelles", je ne suis plus très tentée par les nouvelles écrites par Oates... De plus, je n'aime pas des masses les nouvelles en général - comme Manu ! (les points communs entre elle et moi sont suffisamment rares que pour être soulignés ;)) - donc je passe ;)

    RépondreSupprimer
  14. J'ai un petit peu de mal avec cette auteure..

    RépondreSupprimer
  15. Je capte aussi le message envoyé à Manu. En +, il faut absolument que je découvre cette auteure, depuis le temps que je la vois sur la blogo, j'ai l'impression d'être la seule à ne pas la connaitre.

    RépondreSupprimer