25 janvier 2010

Deux nouveaux challenges sur la blogosphère

Au cas où certain(e) s d'entre vous ne sauraient plus quoi ajouter à leur colonne "Challenges" (Ys et Choco si vous me lisez^^) ...
Voici deux défis ô combien audacieux et originaux puisqu'ils nous proposent de :

1) Découvrir et partager un premier roman : merci à Saphoo (cliquez sur le logo pour les détails)


2) Découvrir la littérature de l'Europe Centrale et Orientale : merci à La plume et la page (cliquez sur le logo pour les détails)


Inutile de dire que ma challengite aigüe n'a pas pu résister...

La Dame pâle - Alexandre Dumas


"La Dame pâle" est un conte fantastique écrit par Alexandre Dumas en 1849.
Ce conte nous plonge dans le récit mystérieux d'Hedwige, une Polonaise ayant fuit son château durant la guerre de 1825 opposant la Russie et la Pologne pour rejoindre les monts Carpathes, situés dans une région infestée de brigands.
Suite à une bataille, elle est recueillie par Grégoriska, héritier de la famille Brocovan, qui la conduit dans son château où vivent également sa mère Smérande et son demi-frère Kostaki.
Rapidement, les deux frères tomberont amoureux de la jeune femme. Le triangle amoureux ne prendra fin qu'une fois que le sang aura été versé...

Vous l'aurez sans doute remarqué, une vague vampirique s'est progressivement répandue dans les librairies et la blogosphère depuis quelques mois.
N'étant pas spécialement une fan de bit-litt, je ne rechigne toutefois pas à découvrir une petite histoire de vampires de temps en temps (preuve en est, j'ai quand même vu les 2 adaptations de "Twilight" ^^).
Bien qu' "Edward" sonne plus joliment à mon oreille que "Grégoriska", je dois reconnaître avoir passé un bon moment de lecture avec ce conte fantastique.
Les éléments attribués au genre du conte sont bien présents ( distinction entre le bien et le mal et personnages manichéens, princesse, château, histoire d'amour).
Même si le romantisme se dénote dès le début du récit, celui-ci se voit obscurci par les mystères entourant la famille Brancovan ainsi que par les événements tragiques qui toucheront à différents niveaux tous les personnages du conte.
Je ne suis pas encore motivée à découvrir "La reine Margot" ou "Les quatre mousquetaires" mais je dois reconnaître que Dumas a pour lui un indéniable talent de conteur, particulièrement illustré dans les descriptions des Carpathes, et a, en ce sens, réussi à me surprendre positivement avec ce récit!


" Nos monts Carpathes ne ressemblent point aux montagnes civilisées de votre Occident.
Tout ce que la nature a d'étrange et de grandiose s'y présente aux regards dans sa plus complète majesté. Leurs cimes orageuses se perdent dans les nues, couvertes de neiges éternelles ; leurs immenses forêts de sapins se penchent sur le miroir poli de lacs pareils à des mers; et ces lacs, jamais une nacelle ne les a sillonnés, jamais le filet d'un pêcheur n'a troublé leur cristal, profond comme l'azur du ciel; la voix humaine y retentit à peine de temps en temps, faisant entendre un chant moldave auquel répondent les cris des animaux sauvages : chant et cris vont éveiller quelque écho solitaire, tout étonné qu'une rumeur quelconque lui ait appris sa propre existence." p.15

Je compte par ailleurs découvrir un roman de sa descendance prochainement!


D'autres avis : George - Pimprenelle - La Liseuse - Thalia - Soukee

"La Dame pâle" était une lecture commune avec George dont j'ai hâte de découvrir le billet!


23 janvier 2010

Les cousines - Aurora Venturini


"Les cousines" est le dernier roman de l'écrivain argentin Aurora Venturini, amie d'Eva Perron mais aussi de Sartre, Ionesco, Camus et Simone de Beauvoir.
Ce roman fut publié en 2007 en Argentine et est paru la semaine passée aux Editions Robert Laffont.
Il s'agit du premier roman de l'auteure à être traduit en langue française.

"Les cousines" est le récit d'une famille argentine laquelle, en apparence étriquée et soucieuse du qu'en dira-t-on, abrite une belle brochette de "simples d'esprits"...
Au milieu du jeu de quilles se trouve Yuna, la narratrice, une jeune femme souffrant également de retard mental mais qui a pour elle un indéniable talent pour la peinture qui la préserve de la folie ambiante.
Alors que Yuna perce rapidement dans le milieu artistique avec l'aide d'un professeur qui lui promet une brillante carrière, le reste de la famille dégénère...
Avortements, prostitution, décès, Yuna raconte de ses 12 à ses 19 ans le quotidien d'une famille pas comme les autres.

La narratrice, bien que d'un niveau intellectuel nettement supérieur à celui de toute sa famille réunie, souffre d'un certain retard, chose qu'elle ne manque d'ailleurs pas de rappeler au lecteur tout au long du roman.

"Je suis si fatiguée par la ponctuation les virgules indispensables pour respirer sinon on étoufferait et je ne veux pas disparaître avant d'avoir présenté un nombre important de tableaux au Salon des Beaux-Arts, le professeur a expliqué que ce serait une exposition uni-personnelle c'est-à-dire d'une seule personne, qui donnera des écrits et documents sur sa vie que quelqu'un lira et admirera non pour l'écriture qui manque de style mais pour les tableaux présentés et dont on parlera dans les journaux et les revues et je suis fière de mon oeuvre et que le professeur m'appelle la petite à la cravate à cause de ma ressemblance avec la jeune fille mélancolique de Modigliani." p.65

Des virgules omises volontairement, des justifications quant à l'emploi du dictionnaire, des retours en arrière sur certains événements, des répétitions quant aux liens familiaux unissant les personnages (qui de temps à autre n'étaient d'ailleurs pas superflues, tant j'ai du mal à me repérer dans les (pré)noms à consonance étrangère...).
Au fil de ma lecture, l'impression de devoir m'adapter constamment au niveau de la narratrice ne m'a pas quittée.
C'est une sensation à la fois dérangeante (frustrante même) mais laquelle provoque un effet "plus vrai que nature" assez bien réussi puisque j'ai vraiment eu le sentiment de partager la vie de cette narratrice un brin...particulière.

Quand j'ai commencé à lire ce roman, j'ai de prime abord trouvé Yuna détestable.
Le dégoût qu'elle manifestait envers sa famille, son ton supérieur additionné de mots très durs employés à l'encontre de sa soeur me révulsaient (à cet effet, j'ai souvent pensé à des extraits lus de "Où on va papa?" de Fournier).
Mais c'était sans compter la centaine de pages qui m'attendait encore et dont la lecture m'a ouvert les yeux quant à toutes les injustices commises à l'égard de la jeune fille.
Car si elle déteste sa famille, ce n'est pas sans raison, cette même famille le lui rend bien.
Or, si la différence est bien une affaire de naissance, l'indifférence n'a, elle, rien de génétique.
Ce n'est que lorsque Yuna commence à rapporter de l'argent à la maison que sa famille la laisse un peu plus tranquille, mais on est bien loin des démonstrations de fierté ou de tendresse.
C'est sans doute cet aspect qui m'a le plus secouée dans ce roman, cette absence totale d'affection qui m'avait déjà frappé, certes de façon moins extrême, dans "Mal de pierres".

Pour pouvoir canaliser ses émotions, Yuna transpose ses souvenirs sur la toile, la peinture lui évitant ainsi de sombrer dans la folie ou du moins réussit-elle à la maintenir suffisamment lucide que pour pouvoir différencier le bien du mal.
La peinture est son refuge (comme ce fut le cas pour Séraphine de Senlis ou Frida Kahlo) comme le sont les mots, piochés dans le dictionnaire pour pallier toutes les explications que Yuna ne peut recevoir de sa famille.

"Je crois que le dictionnaire me fait du bien, je crois que je vais surmonter des difficultés qui me semblaient auparavant insurmontables et je ne parle pas de ce que j'ai en tête : si je surmonte vraiment mon handicap, j'irai vivre seule parce que tous ces gens sont fatigants je vois en profondeur tout autant que je parle en surface ce que je vois en profondeur ne me plaît pas et de loin ça me fera moins mal ou ça ne me dérangera pas parce que je m'éloigne chaque minute davantage de ce qu'on appelle famille et je m'occupe de plus en plus de moi." p.96

Bien que j'ai souri à quelques démonstrations d'"innocence"( je pense notamment à l'explication sur le "secsoral"), j'ai rapidement réalisé à quel point cette naïveté pouvait être dangereuse et que celle-ci était incontestablement à l'origine de ce prisme de malheur entourant la famille.
La question du sexe est assez présente dans ce récit campé en majorité par des femmes. C'est même à elle seule qu'elle détermine leur rapport au sexe opposé.
Ici encore, les sentiments sont absents.
Certains faits peuvent choquer, sans compter la façon "rustre" dont ils sont évoqués.
Cette ambiance sombre et crue ne m'a pas semblé dissonante dans la mesure où les personnages sont tous "tarés" et que, partie de cet état de fait, je ne m'attendais pas à un langage très élaboré ni à des actes bien glorieux.
Non pas que j'attribue la méchanceté et le vice à toutes les personnes handicapées, loin de là.
Mais disons que comme le lecteur est très rapidement mis en situation, cela ne présage rien de "normal" pour la suite.

Bien que j'ai trouvé le regard extérieur de Yuna froid, impitoyable (mais souvent juste), maladroitement exprimé dans un style qui peut fatiguer à la lecture (j'ai tout de même mis quelques jours pour lire ce roman qui fait moins de 200 pages) et malgré que l'absence de tous sentiments dans le roman m'ait glacé le sang, j'ai trouvé ce récit parfaitement bien mené du début à la fin.
Les personnages sont bien cernés et fidèles dans leurs faits et gestes (l'auteure est psy, ce n'est pas un hasard). Tandis que bon nombre d'entre eux périclitent, Yuna évolue au fil des années, ce qui se ressent dans le style qui devient plus phrasé que parlé.
Enfin, j'ai aimé la force et le courage de la narratrice à lutter seule face à son handicap par la peinture et l'apprentissage des mots.

Bref une lecture peu commune que je ne recommanderais pas à tout le monde.
Je conseillerais ce roman aux lecteurs avertis qui ne craignent pas d'être "dérangés dans leur normalité", aux personnes que le handicap mental intéresse et qui se sentent prêtes à le voir secoué par un regard extérieur.
J'ajouterais également que comme il est de mise concernant les sujets délicats, il est préférable de choisir un bon moment pour lire ce roman.

Sur ce, je viens de réaliser que mes trois dernières lectures atteignaient un niveau de joyeuseté frisant le néant. Après la folie, les familles psychorigides, le handicap et la solitude, je crois que je vais aller pleurer dans les jupes de maman et réfléchir à la direction de ma prochaine lecture afin de, pour reprendre une expression que j'ai aimée dans ce roman, "sourire comme une portion de pastèque".

Les billets de Clara, Canel et Nina qui ont été plus sévères que moi, chose qui ne m'étonne pas tellement vu le côté "ça passe ou ça casse" du sujet et la façon dont il est traité.


Un grand MERCI à et aux de m'avoir offert ce livre!

20 janvier 2010

Tu n'es pas seul(e) à être seul(e) - Stéphanie Janicot


"Tu n'es pas seul(e) à être seul(e)" est un recueil de nouvelles de Stéphanie Janicot publié en 2005.
Les 16 nouvelles présentes dans ce recueil évoquent des instants du quotidien au sein duquel la solitude semble davantage un poids qu'une délivrance.
Des époux qui ne s'aiment plus mais restent ensemble par crainte de finir seuls, une mère de famille qui a hâte de prendre du temps pour elle et le regrette l'instant d'après, un séducteur en fin de carrière qui songe à se caser, un bébé qui aimerait passer plus de temps avec sa mère, une vieille dame à qui une panne de télévision révèle le vide de sa vie,...
Tous les personnages de ce recueil habitent le même immeuble, se croisent presque chaque matin sans se connaître, s'imaginent que la vie des autres doit être plus belle que la leur.
Alors qu'en réalité ils sont tous seuls à être seuls...

Je ne me souviens plus exactement de la raison qui m'avait poussée à acquérir ce livre. Peut-être était-ce ce titre pour le moins évocateur ou encore cette jaquette qui me fit de l'oeil ce jour-là.
Stéphanie Janicot nous livre quelques instantanés, extraits du quotidien de ces hommes et de ces femmes, jeunes et moins jeunes, dont elle dresse les portraits isolés ou du moins est-ce le cas au début.
Au fil des nouvelles, le lecteur se rend compte que ces personnages ne sont pas si étrangers les uns aux autres.
Non seulement ils sont tous voisins, mais ils ont également pour point commun d'être tous des êtres humains, avec leurs caractères, leurs métiers, leurs souvenirs, leurs faiblesses mais aussi leurs angoisses face à la solitude, ressentie telle une épée de Damoclès à des âges et à des degrés différents.

" Elle pense qu'elle devrait sûrement le tromper (si elle était sage), mais l'idée la fatigue, et la dégoûte un peu aussi. Cette familiarité qu'il lui faudrait recréer de toutes pièces.
Alors que c'est si simple d'attendre la mort tranquillement, avec bonne conscience.
Tout le monde ne peut pas réussir sa vie. Au moins n'a-t-elle pas de soucis d'argent, c'est déjà ça; ni de craintes pour son intégrité physique, ah non, Gilbert Sampieri n'est pas un nerveux, et c'est appréciable.
Certes, cette vie est un peu ennuyeuse, à chacun sa pierre." p.34

Bien que j'ai apprécié le procédé utilisé par l'auteur et consistant à partir de l'individualité pour ensuite glisser vers le groupe, j'ai globalement trouvé ces portraits assez fades.
Une impression de "déjà lu" dans un Pancol ou un Gavalda avec les "boulchite" en moins et les parenthèses en plus. Peut-être même un Barbery (?)
Une ou deux lourdeurs aussi :

" Bertrand n'avait pas tellement crié Aline pour qu'elle revienne si bien que la jeune maman était passée de trop d'hommes (compliqué à gérer) à pas assez." p.103

Bref, un de ces recueils qui se lisent vite et s'oublient aussi rapidement. Une lecture qui ne m'a pas foncièrement déplue mais que j'imaginais autrement, plus originale sans doute.


Un autre avis : Lael

"Tu n'es pas seul(e) à être seul(e)" était une lecture commune avec Emilie et Manu avec qui j'ai entamé un petit régime PALesque ^^ et dont j'attends impatiemment les avis!

15 janvier 2010

Mal de pierres - Milena Agus


"Mal de pierres" est un roman de l'auteure italienne Milena Agus paru en 2006.
La narratrice nous détaille la vie de ses grands-parents, un couple atypique uni par un mariage de convenance.
En 1943, sa grand-mère a 30 ans et souffre de graves calculs aux reins ("le mal de pierres") qui l'empêcheront plus tard de mener à terme bien des grossesses.
Bien qu'étant une belle femme, elle est toujours célibataire et accusée d'écrire en secret des lettres coquines à des hommes.
Ses parents décident donc de la marier à un veuf de 40 ans, de passage chez eux pour quelques temps.
Tous deux ne s'aiment pas et s'accordent à vivre comme frère et soeur tandis que le grand-père continue à fréquenter les maisons closes.
Le couple traverse la guerre en toute amitié, veillant l'un sur l'autre, s'adonnant à des "prestations" pour économiser des frais de maison close mais sans que leur union ne devienne un mariage d'amour.
En 1950, la grand-mère part en cure thermale et y fait la connaissance d'un rescapé, un homme qui lui apprendra à aimer...

Pour commencer, je dirais que j'ai été étonnée de cette lecture. La chose est de plus en plus rare depuis que je consulte fréquemment les blogs de lecture mais il m'arrive encore parfois d'acheter un livre sur simple base de son titre et/ou de son résumé.
Bien souvent, au moment de succomber à l'achat, je suis déjà en train de me représenter l'histoire du roman à partir du peu d'éléments dont je dispose.
Ce fut le cas pour ce livre dont le titre, "Mal de pierres", m'avait fait imaginer une héroïne en prise avec des problèmes de santé qu'elle détaillerait durant tout le roman.
Or il n'en fut rien ou presque car l'aspect maladie est finalement très peu traité dans ce récit.
En revanche, les conséquences de la maladie à savoir le séjour de la grand-mère en cure thermale tiendront une place majeure dans le récit puisque c'est de cet épisode que naîtra la rencontre entre la grand-mère et le rescapé, un élément déterminant dans tout le roman.
Bref, cette méprise m'a fait sourire.
Je pourrais vous donner 1000 raisons pour lesquelles j'ai adoré ce roman mais je me contenterai des raisons littéraires.

Tout d'abord, j'ai beaucoup aimé le schéma narratif du roman. L'auteur a choisi de commencer en douceur, en nous distillant des détails sur sa famille mais sans toutefois mener les descriptions jusqu'au bout.
Le récit prenant place en Sardaigne (de nombreux mots italiens parsèment d'ailleurs l'histoire), j'y ai trouvé une ambiance à la fois chaleureuse dans les détails des réunions de famille et de la solidarité entre ses membres et rigide pour ce qui est des jugements de ces mêmes membres à l'égard de la grand-mère.

J'ai beaucoup aimé le personnage de la grand-mère qui vis-à-vis de l'extérieur semble toujours dérangée, perdue dans son monde, pas méchante mais insensible aux petites joies des uns et des autres alors qu'elle est capable des plus vives émotions dans certaines situations.

" Grand-mère n'est pas sur les photos. Elle s'était réfugiée dans sa chambre pour pleurer d'émotion quand ils avaient entonné Joyeux anniversaire. Ils étaient tous allés la tirer de là et elle répétait inlassablement qu'elle n'arrivait pas à croire que son corps avait fabriqué un enfant, et pas seulement des pierres. " p.106

Je trouve que l'auteure a parfaitement réussi à décrire la solitude et les conflits intérieurs de cette femme au point que j'ai eu l'impression qu'elle vivait en moi durant tout le roman (chose qui ne m'arrive pas si souvent que cela malheureusement).
J'ai tout autant apprécié le point de vue de la narratrice, la petite-fille, dont on sent bien toute la tolérance, la compréhension et l'amour pour cette femme qui lui fit office de mère.
Bien que je n'adhère absolument pas à ce schéma de couple, j'ai également souri en découvrant le quotidien des grands-parents et plus particulièrement le récit de leurs "prestations" quand ils "jouaient à la maison close".
Même si ceux-ci n'étaient pas amoureux, ils étaient tous deux consentants et s'amusaient beaucoup de ces jeux, aussi bizarres soient-ils.
Je me suis surprise à rêver à la lecture des échanges entre la grand-mère et le rescapé, la seule personne qui semble réellement la connaître avec sa petite-fille.

" Le Rescapé dit qu'à son avis grand-père était un heureux homme, vraiment, et pas, comme elle le prétendait, un malchanceux qui aurait écopé d'une pauvre folle, elle n'était pas folle, simplement elle était une créature que Dieu avait faite à un moment où Il n'avait pas envie des femmes habituelles en série, Il avait eu une inspiration poétique et Il l'avait créée, grand-mère riait de bon-coeur, disait qu'il était fou lui aussi et que c'était pour ça qu'il ne voyait pas la folie des autres." p.68

Les personnages secondaires s'ajoutent au fur et à mesure, de façon très naturelle, et ce n'est qu'à la fin, alors que la grand-mère vient de mourir, que le lecteur découvre le fin mot de l'histoire grâce aux détails qui lui manquaient au début.
Enfin, j'ai beaucoup apprécié la fin de ce roman qui, bien qu'elle puisse se deviner, a réussi à me flanquer les larmes aux yeux.
A noter que le roman est suivi d'une note de l'auteure nous expliquant son rapport à l'écriture (et auquel j'adhère à 200%) ainsi que les conditions de publication de son premier roman.

Bref, un sacré coup de coeur que je recommande à tous ceux et celles qui ne l'ont pas encore lu ( mais j'ai quand même l'impression que ce roman a déjà bien fait le tour des blogs et à juste titre!).


"Mal de pierres" était une lecture commune avec George, Clara et Lili Galipette dont j'ai hâte de connaître les impressions de lecture!

D'autres avis encore chez BOB

13 janvier 2010

L'économie du ciel - Jacques Chessex


"L'économie du ciel" est un court roman autobiographique de l'écrivain suisse Jacques Chessex (auteur notamment du "Vampire de Ropraz" dont j'avais parlé ici) et paru en 2003.
Sur une route déserte de campagne, un petit garçon de 8 ans rentre chez lui et tombe nez à nez sur son père, professeur et directeur d'école, qui n'est pas censé se trouver là à cette heure de la journée.
Le père qui semble vouloir se cacher fait promettre à son fils de ne jamais révéler l'avoir aperçu en ces lieux.
Le lendemain, une vieille dame est retrouvée morte chez elle, cette même dame qui hébergeait une jeune réfugiée à qui son père donnait cours à domicile 3 fois par semaine.
Le jeune garçon se demande si ce décès n'aurait pas un quelconque rapport avec les bizarreries de son père la veille...
Ce petit garçon, c'est Jacques Chessex.

Chessex rumine, déterre la mémoire de son père et ces souvenirs qui lui sont associés, enfouis depuis si longtemps dans sa mémoire d'enfant.

" Combien de fois me suis-je efforcé de réécouter ces mots, ces phrases qui résonnent sourdement sur le fond de l'automne.
Ces mots, ces phrases qui se forment et qui résonnent, définitives, pourtant sans fin, sur le fond cotonneux de l'automne où ces phrases ont été dites, par moi affreusement écoutées, refusées, oubliées, enfouies, depuis quelque temps retrouvées dans leur précision intacte.
J'ai huit ans, c'est la guerre, mon père dirige les écoles et le collège, il fait beaucoup de bien autour de lui." p.18

Il se rappelle aussi ce policier qui le harcèlera tout au long de sa vie, comme pour lui faire endosser le crime de son père et lui faire avouer ce secret bien trop lourd à porter pour un petit garçon.
Alors que le style de Chessex dans "Le Vampire de Ropraz" se voulait très "médico-légal", froid, neutre, l'écriture prend ici un tournant diamétralement opposé. Une narration vive et chargée en émotions. Normal vu le sujet me direz-vous.
La répétition de certains détails qui l'ont accompagné durant toute son enfance et qu'il n'avait jusque là confiés à personne.

Mais mais mais... la seconde partie du roman prend un tournant inattendu...Voilà que l'auteur se passionne pour les oiseaux puis, suite à la découverte d'un oiseau rare, fait la rencontre d'une femme journaliste à " Oiseaux d'Europe" qui lui fera une demande assez particulière...

" On ne devrait pas trop s'occuper des oiseaux qui eux ne s'occupent ni de nous, ni du ciel que nous voyons, ni du ciel que nous ne voyons pas et que nous disons celui de Dieu. Les oiseaux nous pillent et ravagent nos rêves. S'il y avait une justice théologique, Alfred Hitchcock serait canonisé depuis belle lurette d'avoir montré de quelles horreurs les oiseaux peuvent menacer les habitants de la terre." p.62

C'est à ce moment-là que le roman part un peu en sucette. L'auteur semble vouloir se distancier, il ne parle quasiment plus de son père et l'histoire se termine sur le destin de cette femme.
Le lecteur ne saura jamais quelle était la teneur de ses relations avec son père suite à leur rencontre sur cette petite route.
Bien que les deux parties soient intimement liées, j'ai trouvé l'arrivée de cette femme trop rapide.
Quant à la chute de l'histoire, elle m'est tombée dessus comme un couperet (exactement comme pour "Le Vampire de Ropraz" d'ailleurs).
"L'économie du ciel" est donc un roman qui se lit comme une nouvelle.
Aucune introduction, il faut raconter, se décharger du poids, rapidement, parce que ça fait trop longtemps et que le secret se fait plus lourd de jour en jour.
Ce court roman aurait pu porter le titre du roman autobiographique de Michel Sardou : " Et qu'on en parle plus".
J'ai vraiment eu l'impression que l'auteur ressentait le besoin urgent de se confesser avant de clore ce chapitre de sa vie.
J'ai ressenti comme un goût de trop peu. Ce livre est passé comme un éclair et c'est bien dommage :/

11 janvier 2010

Swing mineur - José-Louis Bocquet


"Swing mineur" est le 14 ème roman du français José-Louis Bocquet, écrivain et scénariste de bandes-dessinées, notamment connu pour ses bd's "Kiki de Montparnasse" ou encore "Les aventures d'Hergé".
"Swing mineur" est l'histoire de K., le dernier producteur musical indépendant, vue par 3 hommes qui l'ont connu à différents moments de sa vie, tantôt au sommet de la gloire, tantôt au bord du dépôt de bilan.
Le premier "témoin" est un apprenti journaliste qui tente de faire connaître un rappeur de banlieue prénommé Rachid (ou plutôt Ra-Sheed).
Le succès sera au rendez-vous pour K. comme pour les deux jeunes hommes mais les choses dérapent...
1er mouvement.
K. prend sous son aile un jeune qui a arrêté ses études après le bac. Il lui apprend le métier sur le tas et ensemble ils prennent le risque de signer "Les Chapeaux Ronds", un groupe breton qui fait de la chanson populaire.
Malheureusement, l'affaire tourne mal.
2ème mouvement.
Le fils de K. lui demande son aide, son père accepte de l'héberger à condition qu'il travaille à ses côtés.
Le label de K. tourne mal, il faut trouver une solution rapidement. Un groupe de rock les sauvera de la faillite mais certaines affaires du passé ressurgissent...
3ème mouvement.

Ce roman dresse donc le portrait de Mr K., un homme sans diplômes ayant réussi à partir de rien, un malin qui semble bien connaître son métier mais souffre en même temps de revers de médaille, dans ce monde particulier qu'est le show-business.
Les trois versions données par les différents témoins décrivent une sorte d'irréductible gaulois, capable de dénicher des talents totalement insoupçonnés, souvent peu aimable et difficile à suivre mais qui reste celui qui, en devenant leur mentor, leur a donné une chance que les autres leur auraient refusée.
Tous les 3 connaîtront tour à tour avec K. la gloire et les affres de l'industrie musicale, un monde où il faut pouvoir parier gros et juste, tout en risquant de perdre sa mise. Une vraie roulette russe.
La première partie nous plonge dans le monde du rap et de son vocabulaire des cités.
Bien que je n'ai pas du tout accroché à cette partie en raison des multiples " boules", "zyva", "skeuds", "niker le système" et j'en passe (ça me fait penser que j'ai encore "Kiffe kiffe demain" dans ma PAL...), je dois bien reconnaître qu'elle est criante de réalisme ( c'est mon heure quotidienne passée dans le métro qui me l'a dit).
La narration se fait plus fluide dans les deux autres parties et le personnage de K. y est plus développé.
Ce qui m'a le plus frappée dans ce roman c'est la fadeur des 3 personnages secondaires, tous plus paumés les uns que les autres, agissant selon le bon vouloir de Mr K. et complètement incapables de prendre une décision voire de donner un sens à leur vie.

" Dans les quartiers, autour de moi, tout le monde rappait, scratchait, breakait, graffait. Je vivais dans un monde d'artistes. Mais l'art, c'est comme le foot, ils sont plus nombreux dans les tribunes que sur le terrain. Une minorité exécute les rêves d'une majorité, c'est une question d'équilibre, de yin, de yang et de balance commerciale. Ne survivent que les meilleurs.
C'est pour ça, moi, je n'ai jamais pratiqué la compétition.
Ou alors tout seul, dans ma propre catégorie. Le lancer de cacahuètes. Soixante-quatre cacahuètes de suite, sans en faire tomber une parterre. Direct dans la bouche." p.19

Mr K. est bel et bien la vraie star de ce roman. Même au pied du mur, alors que tout semble fini pour lui, il parvient toujours, tel un sauveur, à sortir une dernière carte de sa manche et à entraîner les autres avec lui.
Toute l'ambiance du roman baigne ainsi dans les retournements de situation, les coups de la dernière chance, les dettes et les règlements de compte façon Scarface.

" "Le show-biz est une valse à trois temps. On lèche, on lâche, on lynche." disait K.
Je l'écoutais, il parlait d'expérience, j'étais un novice. Il m'appelait "l'innocent", je rigolais.
"T'as raison, rigole bien, mais fais attention, parce que toi aussi un jour tu auras les mains couvertes de sang."
Parfois, il parlait aussi comme un vieux con. " p.77

Bien que j'ai aimé la structure de ce récit en ce qu'il nous présente un portrait vu sous différents angles ainsi que la description faite de ce milieu pourri que semble être l'industrie musicale, je n'ai pas vraiment réussi à rentrer dans cette histoire et suis restée complètement hermétique vis-à vis de ces personnages secondaires complètement mous.

Un roman que je n'irais pas jusqu'à déconseiller mais qui pour moi fut une lecture divertissante plutôt qu'absolument nécessaire.


D'autres avis : Diane - Aily - Thalia - Fée Bourbonnaise


Un grand MERCI à et aux Editions de m'avoir offert ce livre!