J'ai eu beaucoup de plaisir à redécouvrir cet auteur dont je ne connaissais que "Le Joueur d'échecs".
Seule incompréhension (apparemment partagée) : pourquoi une préface signée Elsa Zylberstein?
Encore une recommandation sortie de nulle part mais comme l'actrice parle très bien du livre, l'interrogation quant à sa présence en devient secondaire.
"Lettre d'une inconnue" est l'histoire d'un amour à sens unique, d'un secret dont le silence se voit rompu par l'envoi d'une lettre, ultime confession, ultime adieu d'une femme qui a choisi de dédier sa vie corps et âme à un homme qui ne la (re) connaîtra jamais.
D'une simple rencontre entre un romancier et une jeune fille naît une passion (ici ramenée à son sens premier) nourrie par la fascination adolescente, les fantasmes d'une fille devenue femme et quelques ébats dont le romancier ne garde aucun souvenir.
Dans un sursaut de pragmatisme, je me suis quand même demandée comment il était possible de ne pas reconnaître quelqu'un après seulement 3 ans mais c'est quand compter que le romancier, tendre et léger, est l'homme de toutes les femmes alors qu'elle, entière et passionnée, lui restera dévouée jusqu'à son dernier souffle.
Pitié, révolte et solidarité féminine (on a quand même envie de la secouer la cocotte!), empathie : plusieurs sentiments se sont entrechoqués au fil de cette lecture.
L'héroïne m'a un peu fait penser au personnage d'Angélique dans "A la folie...pas du tout" à la différence près que le fantasme obsessionnel ne dérive pas en érotomanie ou en névrose.
Au contraire, ce qui rend l'héroïne si attachante, c'est l'immense dignité avec laquelle elle vit cet amour, toujours dans ce souci de ne pas déranger son bien-aimé, même au travers de cette seule et dernière lettre dont elle va jusqu'à excuser le peu d'amertume.
En plus d'une qualité de plume manifeste, j'ai beaucoup aimé la justesse avec laquelle Stefan Zweig a réussi à retranscrire l'imaginaire féminin (bien qu'ici poussé à l'extrême).
Merci qui? Merci à son ami Sigmund!
Extrait :
" Toutes les formes possibles, de ta froideur, de ton indifférence, je me les étais toutes représentées, dans des visions passionnées; mais, dans mes heures les plus noires, dans la conscience la plus profonde de mon insignifiance, je n'avais pas même osé envisager cette éventualité, la plus épouvantable de toutes; que tu n'avais même pas porté la moindre attention à mon existence.
Aujourd'hui, je le comprends - ah! tu m'as appris à comprendre bien des choses!-, le visage d'une jeune fille, d'une femme, est forcément pour un homme un objet extrêmement variable; le plus souvent, il n'est qu'un miroir, où se reflète tantôt une passion, tantôt un enfantillage, tantôt une lassitude, et il s'efface si vite, comme une image dans une glace, qu'un homme peut sans difficulté oublier le visage d'une femme, d'autant mieux que l'âge y fait alterner l'ombre et la lumière et que des costumes nouveaux l'encadrent différemment.
Les résignées, voilà celles qui ont la véritable science de la vie." p.57-58
D'autres avis : Malice - Mon coin lecture - Raison et sentiments - Mes contemplations et mes digressions - Wictoria - Leiloona - Des livres et des champs
J'ai cru un moment que tu parlais d'Angélique marquise des anges, cela m'étonnait tellement que j'ai vérifié..ouf.
RépondreSupprimerTon billet donne envie de lire le livre.
Bonne soirée
C'est vrai qu'une préface de Elsa Zylberstein, c'est étonnant mais bon si elle en parle bien, pourquoi pas ?
RépondreSupprimerJe suis très tentée par ce livre.
Vive Zweig ! Tout Zweig !
RépondreSupprimer@Cécile : une amie me disait hier soir que "La confusion des sentiments" était le meilleur ouvrage de Zweig mais je lis tellement de préférences différentes qu'effectivement je vais finir par lire toute son oeuvre ;)
RépondreSupprimerje crois que pour le moment c'est avec la Peur ma nouvelle préférée de Zweig j'ai trouvé cette histoire d'amour complètement vibrante et je te laisse découvrir l'aticle que je viens d'écrire Merci de tes commentaires
RépondreSupprimerJ'ai adoré cette nouvelle : j'ai trouvé le ton très juste et poétique, plus mélancolique que larmoyant... J'ai vraiment passé un très bon moment avec ce livre !
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