Publié en 1993, "Le ventre de la fée" est le premier roman de l'écrivaine française Alice Ferney, notamment auteure de "L'élégance des veuves", "La conversation amoureuse", "Paradis conjugal" ou plus récemment de "Passé sous silence".
"Le ventre de la fée" commence tel un conte : la fée, nymphe magnifique, délicate, gracieuse, rencontre un homme ébloui par ses charmes qui l'aime, la désire et la vénère chaque jour avec la même intensité.
Entourés d'un halo de sérénité, ils s'aiment avec insouciance et bientôt la fée met au monde un petit ange du nom de Gabriel, unique enfant qu'elle couvrira de tout son amour de mère.
Mais toute la tendresse de la fée ne suffira pas à calmer le monstre qui grandit dans le corps de son fils.
D'un naturel taciturne et cruel, Gabriel confectionne des boîtes morbides destinées à enfermer les petits corps de ses proies animales.
Au décès de la fée, son mari ne supportant plus de vivre sous ce toit qui abritait leur amour, quitte la maison, laissant Gabriel à lui-même et à ses pulsions malsaines tandis qu'il pleure sur l'abandon de cette mère parfaite.
Le jeune homme écume la ville à la recherche de proies humaines toujours plus jeunes qu'il viole, assassine, dépece, possédant ces corps par la force sans jamais être rassasié ou assailli par le remords.
" Il avait l'impression que c'était le premier véritable viol, et ce qui l'étonnait c'était de vivre cette dérive sans lui prêter aucune gravité. Si incroyable que cela puisse paraître, il avait autrefois retenu des envies dont l'assouvissement le remplissait maintenant d'indulgence.
Il comprit que le plaisir était capable d'étouffer jusqu'aux regrets. Car c'était un plaisir immense, une jubilation du corps qui s'allégeait un instant de toute forme de conscience.
Dans le combat contre le corps de l'autre, lorsqu'il était entré dans le corps de l'autre, lorsqu'il avait refermé ses mains sur la chair de l'autre, et que ses ongles avaient crevé la peau en même temps qu'il crevait de plaisir, il avait oublié.
Oublié ce qu'il y a de plus horrible dans la vie, son déroulement de ruban insensible.
Pour lui désormais c'était clair : son désir assouvi était revenu plus vigoureux, si pressant qu'il faudrait bien recommencer, qu'il était impossible d'imaginer lui résister.
Il ne résisterait pas : la même crise, la même jouissance, il y pensait sans cesse. Il savait qu'il recommencerait, bientôt, demain peut-être, parce qu'il ne contrôlait plus rien de corps baigné une fois dans la violence." p.85
Voilà un conte macabre plutôt déconcertant tant le contraste se veut aussi brutal qu'improbable entre la pureté et l'amour sans bornes de la fée et la violence inouïe de cet insatiable monstre enfanté par elle, comme sorti de la bouche des Enfers. Le cauchemar de toutes les mères !
Et le contraste perdure malgré l'horreur décrite car l'écriture reste égale à elle-même (et c'est d'autant plus perturbant), lumineuse, poétique, fascinante de précision.
Une lecture "horriblement troublante" qui à plusieurs égards m'a beaucoup rappelé "Le parfum" de Suskind.
L'avis de Liliba
ton "horriblement troublante" fait pencher la balance du bon côté !
RépondreSupprimerOui, on se demande jusqu'où ira ce personnage !
SupprimerJe note !! :)
RépondreSupprimerOh oh ! Je me demande ce que tu en penserais car ce roman est plutôt particulier :P
SupprimerJ'ignorais le contenu de ce roman. Je pensais que c'était sur la maternité. Il pourrait m'intéresser finalement. Même si les deux romans que j'ai lus de Alice Ferney ne m'ont pas fait délirer d'enthousiasme.
RépondreSupprimerLes premières pages sont consacrées à la grossesse de la fée mais tout le reste concerne son fils Gabriel qui malgré tout l'amour reçu par sa mère, est incapable de tendresse ou d'empathie.
SupprimerJe me rallie aux impressions et à l'avis de Manu.
RépondreSupprimerMais j'écoule ma PAL, d'abord. Il faut !
Moi aussi je dis cela tout le temps mais ça ne m'a pas empêchée d'acheter ce roman-ci et plusieurs autres ^^
SupprimerEuh, comme je n'ai qu'un enfant, qu'il s'appelle Gabriel, que je le couve d'amour, il faudrait que je sois certaine de ne pas être une fée pour ne pas trop m'identifier ! :lol:
RépondreSupprimerEffectivement, à ta place je trouverais ça bizarre aussi ! Le tout est de parvenir à ne pas s'identifier :P
SupprimerJe n'ai toujours pas lu cette auteure, pas sûr que je commence par celui-ci. Mais la couverture est fascinante.
RépondreSupprimerAh mais Klimt est fascinant ;) Cette toile renvoie à un personnage angélique, tout le contraire de sa progéniture...
RépondreSupprimerFinalement, malgré le contraste un peu "hors norme", tu as l'air d'avoir aimé.
RépondreSupprimerOui oui je l'ai aimé mais je ne m'attendais pas à ce style si poétique pour une histoire qui ne l'est pas du tout ;)
SupprimerDe cet auteur, je n'ai lu que "Grâce et dénuement". Je ne connaissais pas ce roman, mais il me tente, je le note donc ! Merci !
RépondreSupprimerDe mon côté j'ai encore "La conversation amoureuse" qui m'attend dans ma PAL ;)
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