24 avril 2010

Tous les matins du monde - Pascal Quignard


"Tous les matins du monde" est un roman de l'écrivain français Pascal Quignard, publié en 1991.
Nous sommes au 17ème siècle. Monsieur de Sainte Colombe ne se remet pas de la mort de son épouse qui l'a laissé seul avec leurs deux filles. L'homme passe ses journées dans sa cabane et y joue de la viole des heures durant, refusant à maintes reprises de se rendre à la cour pour y divertir le roi.
Un jour, un jeune homme du nom de Marin Marais vient à frapper à sa porte et l'enjoint d'accepter de le prendre comme élève. Or les deux hommes nourrissent des conceptions bien différentes de ce que doit être la musique.

Voici un court roman qui traite avant de tout de la musique et de l'importance qu'elle revête pour les différents personnages. Monsieur de Sainte Colombe lui a dédié sa vie. C'est un homme taciturne entièrement tourné vers son art et pour le moins asocial. Nostalgique d'un passé qui n'est plus, il passe des journées entières à jouer de la viole ou à parler au fantôme de sa femme dont la mort l'a laissé inconsolable.

" Voilà la cabane où je parle !
Il s'était mis de nouveau à pleurer doucement. Ils allèrent jusqu'à la barque. Madame de Sainte Colombe monta dans la barque blanche tandis qu'il en retenait le bord et la maintenait près de la rive. Elle avait retroussé sa robe pour poser le pied sur le plancher humide de la barque.
Il se redressa. Il tenait les paupières baissées. Il ne vit pas que la barque avait disparu. Il reprit au bout d'un certain temps, les larmes glissant sur ses joues :
"Je ne sais comment dire, Madame. Douze ans ont passé mais les draps de notre lit ne sont pas encore froids." p.79
Marin Marais cherche dans la musique la fortune et la gloire à la cour de Versailles. Rapidement éconduit par l'homme qu'il aurait tant souhaité avoir pour maître, il trouve refuge dans les bras de sa fille, Madeleine de Sainte Colombe, qui semble détecter en lui un talent qu'elle est prête à révéler à l'aide des enseignements dispensés par son père. Madeleine et Marin passeront des heures à guetter le maître dans sa cabane, à l'affût de sonorités que Marin reproduira par la suite en son nom. Mais le jeune homme se lasse rapidement de Madeleine qui ne souffrira jamais son départ.
Il ne souhaite qu'une seule chose : les partitions du génial Sainte Colombe. Malheureusement pour lui, le vieux musicien ne conserve aucune trace de son art. Il ne restera plus à Marais que ses oreilles pour pleurer (oui oui c'est possible!)

" Tous les matins du monde sont sans retour. Les années étaient passées, Monsieur de Sainte Colombe, à son lever, caressait de la main la toile de Monsieur Baugin et passait sa chemise.
Il allait épousseter sa cabane. C'était un vieil homme. Il entretenait aussi des fleurs et des arbustes qu'avait plantés sa fille aînée, avant qu'elle se pendit. " p.107

N'ayant à mon compte aucune sensibilité musicale particulière, je pensais néanmoins pouvoir distinguer dans l'agencement des mots une quelconque mélodie... J'y ai vu des notes ça oui mais aucun enchaînement, aucune musicalité. Des phrases hâchées. Une histoire précipitée par plusieurs sauts chronologiques. Même pas le temps de tendre l'oreille que j'avais déjà tourné la dernière page, incapable de dégager une seule émotion de cette lecture. Sans compter que les personnages, tous en souffrance, m'ont davantage invitée à broyer du noir qu'à m'épancher sur leur sort.
Je me suis donc jetée sur le film, curieuse de savoir si il parviendrait à me rendre l'ouïe.

Le film

"Toute note doit finir en mourant." C'est sur cette réplique, prononcée par un Gérard Depardieu tout en costume d'époque et perruque à grappes, que s'ouvre le film. La vie de Marin Marais touche à sa fin et c'est au cours d'une leçon de musique qu'il enseigne à ses élèves qu'elle fut sa vie dans l'ombre de Monsieur de Sainte Colombe.
C'est sous les traits du fils Depardieu que nous retrouvons Marin bien des années plus tôt, alors qu'il manifestait à Sainte Colombe son désir de devenir un grand violiste.
Comment exprimer mes premières impressions sur ce film? Je ne sais pas si l'on peut imputer la remarque qui suit au fait que je sois directement passée du livre à son adaptation mais j'ai ressenti d'emblée l'impression que les acteurs se contentaient de réciter leur texte à défaut de l'interpréter. J'en ai même ri, c'est tout dire...





Les rares dialogues présents dans le livre ont pour ainsi dire été reproduits à la virgule près. Mis à part la performance de Gérard Depardieu qui campe décidément très bien les personnages en costume, je n'ai guère été sensible au jeu des acteurs.
En revanche, j'ai cette fois entendu de la musique ! Une musique mélancolique, à l'image d'un dernier chant de cygne, qui a réussi à donner un sens nouveau aux nombreux silences communs à tous les personnages.
Musique que je guettais avec l'espoir de sortir de la torpeur...et de la déprime mêlée à l'ennui mais qui n'a pas suffi à elle seule à renverser la vapeur.
"Tous les matins du monde" est d'après moi un film qui s'écoute plus qu'il ne se regarde.
Inutile toutefois de préciser que je suis loin d'avoir été conquise par l'histoire...





D'autres avis : Lili Galipette - Karine:) - Lilly - Emilie - Abeille et d'autres encore chez Bob !

25 commentaires:

  1. je n'ai jamais lu le roman, mais j'ai apprécié le film - j'aime beaucoup ce type de musique, cela a dû m'influencer.

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  2. Le livre ne m'a déjà pas l'air séduisant mais alors le film ... Je ne peux pas voir Depardieu père en peinture. Plus il devient vieux, plus il devient c... Enfin, c'est mon avis. Mais dès qu'il ouvre sa bouche, c'est pour sortir une ânerie.

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  3. Un de mes coups de coeur de l'an dernier...

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  4. Pas lu le livre, c'est peut-être pour ça que j'ai apprécié le film. Un des rares rôles où j'ai trouvé Depardieu supportable.

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  5. @niki : j'ai moi aussi été sensible à la musique, beaucoup moins au reste :/

    @Manu : je ne suis pas une inconditionnelle de Depardieu père mais je dois dire que ce type de rôle lui va plutôt bien !

    @LiliGalipette : je viens de retrouver ton lien et de l'ajouter à mon billet. Effectivement, j'ai vu que ce livre t'avait énormément plu mais je n'y ai pas retrouvé toutes les belles choses que tu évoques, l'écriture m'a laissée de marbre.

    @Ys : je trouve qu'il joue beaucoup mieux que son défunt fils...

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  6. J'ai pas apprécié ce petit roman et du coup je n'ai pas envie de voir le film (surtout après avoir lu ton avis...).

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    1. Je te conseille fortement de voir le film ne serait-ce pour entendre la musique magnifique et profonde composée par Mr de Sainte-Colombe

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    2. Je te conseille fortement de voir ce film ne serait-ce pour entendre la musique magnifique et profonde que Mr de Sainte-Colombe a composée

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  7. J'ai un très bon souvenir du film et j'en écoute encore la musique de temps à autre... Comme Niki, c'est le genre, enfin un des nombreux genres, de musique que j'aime ! ;-)

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  8. Déprimant... oui bien déprimant :-(

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  9. Je me souviens bien du film grâce à la musique que j'avais beaucoup aimé quand je l'avais vu ... Je suis comme Kathel, il m'arrive de l'écouter encore ! Par contre, je voulais lire ce court roman, mais tu viens de m'en ôter l'envie. C'est peut-être une bonne chose ...

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  10. J'adore Pascal Quignard. Villa Amalia m'avait littéralement coupé le souffle l'an dernier. Je serai curieuse de découvrir ce titre malgré ton billet...

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  11. Pas du tout aimé ce roman... Et comme toi, je n'y ai trouvé aucune musicalité et surtout aucune émotion!

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  12. Je ne suis absolument pas musicienne mais par contre j'ai adoré ce roman ! L'écriture m'avait conquise ! D'ailleurs j'ai aussi beaucoup aimé, de cet auteur, Villa Amalia.
    Par contre, le film ne me tente guère n'étant pas une grande fan de Depardieu... ;-)

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  13. Bon un roman qui te fout le cafard... t'as encore bien choisi ton titre... Alors qu'il est si simple de taper dans les auteurs japonais si réjouissants... ^^

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  14. J'ai beaucoup aimé livre et film. l'écriture de Quignard et la lenteur et l'atmosphère du film.

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  15. @Maggie : si tu as apprécié le livre, tu devrais aimer le film vu qu'il est assez fidèle au roman.
    En n'ayant pas aimé le roman, je me rends compte que je partais déjà d'un sacré a priori

    @Kathel : la musique oui, le reste...hum pas pour moi

    @Theoma : pourtant j'aime les histoires tristes mais là...

    @Nanne : il est probable que je sois passée à côté. Il est court, se lit vite, je n'ai pas vraiment eu le temps de realiser ce qui se passait. Cela dit, "Soie" est tout aussi court et m'avait émerveillée.
    Moralité de l'histoire : aucun avis ne vaut une lecture ;)

    @Soukee : je vais essayer de ne pas cantonner à ce livre et tenter "La barque silencieuse" à sa sortie en Poche.
    Je ne connais pas "Amalia", vais me renseigner ;)

    @Abeille : bizarrement, ton avis me rassure ;)

    @Marie : 2 points pour "Amalia", je vais aller voir de quoi il en retourne.
    Les fans de Depardieu sont plus rares que ce que je pensais...

    @Choco : ça me manquait de scalpes et d'acide sulfurique en plein visage, quel dommage ^^

    @Yv : oui pour la lenteur, ce n'est pas moi qui te contredirai... Je ne dois pas avoir le niveau de sensibilité adéquat pour ce genre de roman.

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  16. J'avais été un peu déçue par le livre mais j'adore la couverture qui je crois est aussi celle du film.
    Merci pour le lien ;-)

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  17. j'ai vu le film il y a de nombreuses années, et je l'avais beaucoup aimé. Mais je n'ai toujours pas lu le livre, ni Quignard.

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  18. Je n'ai pas lu le roman mais je garde un bon souvenir du film et je te trouve sévère envers lui! Il est vrai que j'adore Marin Marais et la musique baroque en général et les instruments de l'époque. Ce qui participe au plaisir du film évidemment.

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  19. J'ai parcouru ton blog et je suis stupéfaite par ton appétit littéraire.
    Il fallait bien sûr que je tombe sur un avis que ne correspondrait pas au tien. C'est ce qui fait la richesse d'un monde.
    Ce film est un chef-d'oeuvre. Il n'a besoin de nul effet spécial: l'écriture de Quignard suffit.
    Pascal Quignard est un auteur hermétique, profond, philosophe. Il faut avoir un bagage historique, littéraire, de latiniste et j'en passe pour l'apprécier.
    'Tous les matins du monde' est un des plus beau film que j'ai vu. Nous ne sommes pas dans les grands débordements mais dans la pudeur. Les Depardieu y sont grandioses. Parfois le jeu de l'acteur est de pas montrer qu'il en a un.
    Bien sûr cela n'engage que moi et mon éternel 'avis pas comme les autres.'

    A tout bientôt !

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  20. Je suis obligée de lire cette oeuvre pour le bac, et je dois reconnaitre que même après étude, je n'arrive pas à l'apprécier et à comprendre pourquoi elle est au programme... C'est un mystère!!! De plus, pour moi, Quignard est comme Marin Marais, il fait de l'art pour plaire et pour la gloire et non pour l'art en lui même comme Sainte Colombe ce qui est fort dommage.
    Quant au film, je n'ose même pas en parler... S'il n'y avait pas eu la musique, je ne serais sûrement pas allée au bout!

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  21. Je viens de terminer le livre audio !!!!!!! heureusement il n'était pas très long, mais quand même ce fut une punition, et en plus le lecteur (Jean-Claude Drouot) a une voix trainante et tremblotante même quand ce sont les jeunes qui parlent. Bref, je n'ai pas aimé du tout du tout. Billet un de ces jours ....

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    1. Olalala Sandrine, figure-toi que même 3 ans après, je m'en souviens encore et ...pas en bien...

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