Publié aux USA en 2012 et traduit en français en 2013, "Mon ami Dahmer" est un album écrit et illustré par l'américain Derf Backderf. Il a obtenu le prix Révélation lors du dernier Festival d'Angoulême.
Avant qu'il le redécouvre sous le macabre surnom de "Cannibale de Milwaukee", Derf/Jeff Backderf a côtoyé Jeffrey Dahmer durant leurs années au lycée de Revere High School.
A l'aide de ses souvenirs, de témoignages d'autres lycéens et d'informations collectées par le FBI, l'auteur reconstitue la descente aux enfers de Jeffrey Dahmer.
Adolescent timide et asocial, ce futur serial-killer ne manquait pourtant pas de faire rire ses camarades de classe en singeant les crises d'épilepsie de sa mère.
Une mère qui plus est dépressive et toujours en conflit avec son père, au point que celui-ci finira par déménager, abandonnant Jeffrey et son jeune frère à l'indifférence de sa femme.
Livré à lui-même, Dahmer se découvre homosexuel mais ne l'assume pas. Les 17 victimes qui lui valurent une peine de prison de 957 ans (!!!) étaient d'ailleurs toutes de jeunes hommes ou des mineurs.
Durant ses années de lycée, Dahmer laisse libre cours à sa fascination pour les cadavres d'animaux (qu'il brûle à l'acide ou dépece) et d'humains qu'il associe à une sexualité débridée.
L'alcool dont il s'enivre jour et nuit parviendra, pour un temps seulement, à calmer ses pulsions malsaines...
"Mon ami Dahmer" est le genre d'histoire qui vous fera passer mentalement en revue vos photos de classe à la recherche de la/du bizarre de l'époque qui tout bien considéré aurait très bien pu devenir un/une serial-killer en puissance (et si en plus vous êtes un peu parano comme moi, vous vous surprendrez à taper quelques noms dans Google...).
S'agissant des signes avant-coureurs présidant à la santé mentale de Dahmer, l'auteur reconnaît que lui et les autres jeunes ne prenaient pas vraiment son comportement étrange au sérieux.
En revanche, il pointe du doigt l'indifférence des adultes, qu'il s'agisse des parents ou du corps professoral.i
Personne n'a jamais signalé que Dahmer était ivre, même en cours.
Derf Backderf a volontairement choisi d'arrêter son scénario au moment où Dahmer commet son premier meurtre car, comme il l'affirme : "Mais une fois que Dahmer tue - et je ne le dirai jamais assez -, je n'ai plus aucune sympathie pour lui".
Et d'ajouter : "Ayez de la pitié pour lui mais n'ayez aucune compassion."
Il s'agissait donc avant tout de restituer sa relation avec Dahmer (on ne peut pas vraiment parler d'amitié) et d'établir la genèse d'un serial-killer.
Et on peut dire que l'album est réussi ! Le dessin, tout en noir et blanc, renvoie à cette génération MTV des années 90 (j'ai notamment pensé à Beavis & Butthead). Derf Backderf nous représente un adolescent au visage de marbre, inexpressif même lorsqu'il est bien entouré ou moqué, cruel sans même s'en rendre compte et dans l'indifférence générale.
A lire si ce type de profil vous intéresse :)
D'autres avis : Canel - Choco - Theoma - Val - Yaneck
17ème participation à la bd du mercredi chez Mango