Sortie le 23 septembre, "Signoret, une vie" est une biographie signée Emmanuelle Guilcher, directrice adjointe à la programmation de France 2 et passionnée de cinéma.
Rééditée à l'occasion des 25 ans de sa disparition, cette biographie retrace toute la vie de l'actrice française Simone Signoret, de sa naissance à Wiesbaden en 1921 à son décès dans sa maison d'Autheuil en 1985.
Bizarrement, ce n'est que depuis que j'annonçais mon appréhension vis-à-vis des biographies que je m'en suis vue proposer^^
Cependant, force est de constater que je m'intéresse de plus en plus aux parcours de femmes, particulièrement lorsque ceux-ci prennent place dans l'Histoire.
Après
George Sand, j'ai donc consacré plusieurs jours à la découverte de Simone Signoret dont je connaissais seulement le faciès aux yeux de biche et l'histoire d'amour avec Yves Montand.
Autant dire presque rien...
Née d'une mère française et d'un père juif polonais, la petite Simone Kraminker évolue dans un milieu privilégié, à l'abri dans ce Neuilly qu'elle partage avec sa bande d'amis du Sabot Bleu.
Elle fréquente assidûment le Café de Flore où elle croise de nombreuses personnalités telles que Jean-Paul Sartre (qui enseignait dans son lycée), Pablo Picasso ou encore Jacques Prévert.
A l'automne 1941, elle abandonne son patronyme pour adopter le nom de jeune fille de sa mère, Signoret, et joue sur une parenté fictive avec Gabriel Signoret, célèbre acteur français, pour obtenir ses premiers rôles de figuration.
La guerre offre par ailleurs un contexte propice au lancement de nouveaux acteurs car le milieu du cinéma, principalement investi par les juifs, se retrouve décimé par les départs (in)volontaires de nombreuses vedettes.
En 1944, elle fait la rencontre de celui qui deviendra son mari en 1948, Yves Allégret avec lequel elle aura sa fille Catherine et qui lui donnera ses premiers rôles, notamment dans "Dédée d'Anvers" et "Manèges".
En août 1949, elle fait la connaissance d'Yves Montand qui, à peine remis de sa rupture avec Edith Piaf, tombe sous le charme de l'actrice. Le coup de foudre est réciproque.
Si elle aime avant tout Saint-Germain-des-Prés et les intellos du Café de Flore, l'actrice n'en est pas moins attirée par ce chanteur prometteur dont elle envie le milieu du cabaret et du music-hall et pour lequel elle n'hésite pas à quitter son mari suite à un ultimatum posé par celui qu'elle appellera toujours "Montand".
L'année 1951 offre à l'actrice deux contrats de première importance pour la suite de sa vie : son mariage avec Yves Montand et le tournage de "Casque d'or" qui malgré un accueil peu favorable de la part des critiques et du public français, permet à l'actrice de se distinguer par sa beauté singulière et son incontestable présence scénique.
L'actrice se fait plutôt rare les années suivantes tant son amour pour son mari la conduit à le suivre partout lors de ses tournées. Constamment à ses côtés, elle forme avec lui un bloc indestructible que même la liaison de Montand avec Marilyn Monroe ne parviendra à ébranler, du moins en surface car on sait l'actrice dotée d'un certain orgueil et d'une discrétion assurée dans le domaine de sa vie privée.
Si le couple fut autant médiatisé ce n'est pas pour les frasques de Montand (que l'on savait pourtant coureur) mais pour les nombreux engagements politiques du couple dont les interventions restent gravées dans les mémoires.
Même lorsque leurs opinions divergeaient, Montand et Signoret faisaient front pour défendre les libertés et dénoncer les injustices, manifestant leur soutien à Solidarnosc, aux époux Rosenberg ou encore à l'appel des 121.
Les prises de position au nom d'un idéal communiste furent nombreuses et les erreurs de jugement sous le coup de la naïveté leur firent parfois défaut, constat que le couple reconnaîtra volontiers par la suite.
En 1960, Simone Signoret a conquis Hollywood qui lui décerne l'Oscar de la meilleure actrice pour son interprétation dans "Les Chemins de la haute ville" ("Room at the top"). Une consécration exceptionnelle pour une actrice française.
Les années 70-80 donnèrent l'occasion à l'actrice de tourner avec des acteurs de renom comme Jean Gabin, Alain Delon, Philippe Noiret et Jean Rochefort.
Cette époque correspond à une période de mise à nu pour l'actrice qui bien consciente du passage du temps n'hésite pas à forcer le trait en jouant les vieilles femmes comme dans "La Veuve Couderc" et "La vie devant soi" pour lequel elle obtient le César de la meilleure actrice.
La parution de ses mémoires intitulées "La Nostalgie n'est plus ce qu'elle était" lui vaudra une véritable reconnaissance en tant qu'écrivain, statut qui se verra confirmé en 1985 à la sortie de son roman "Volodia" quelques mois avant son décès le 30 septembre 1985.
Scindé en 4 parties (1921-1949 ; 1949-1956 ; 1957-1969 ; 1970-1985), l'ouvrage aurait pu être divisé selon 3 axes : l'épouse, l'actrice, la citoyenne.
Or Emmanuelle Guilcher a choisi avec justesse de dresser un portrait de la femme en 3 dimensions intimement liées, une femme qui fait figure de passionnée, aussi bien dans sa vie amoureuse que dans ses combats politiques et ses apparitions au cinéma (nettement moins dans sa vie de famille...).
Simone Signoret apparaît comme une femme à part qui se refusait à verser dans le jeunisme et le glamour mais laquelle, exigeante et pointilleuse, préférait se consacrer à ses prestations, son engagement politique et par-dessus tout à Yves Montand qu'elle aimait tant (je serais tentée de dire "trop").
Emmanuelle Guilcher a travaillé durant plusieurs années à recouper les témoignages, les interviews de parents et de proches, les entretiens avec Simone Signoret, Yves Montand, les extraits des mémoires et du roman de l'actrice ainsi que les films dont les résumés m'ont donné envie d'en découvrir certains.
Il en résulte un ouvrage dense mais clair, illustré en son centre par plusieurs photos retraçant les moments-clé de la vie de l'artiste, et qui loin de se cantonner à un portrait d'actrice inscrit également le parcours d'une femme dans son époque et ses troubles.
Pour résumer mon impression sur cette biographie, j'ai choisi de reprendre un passage de l'article de l'hebdomadaire
Rouge consacré à "La Nostalgie n'est plus ce qu'elle était" :
" C'est un livre très beau, très sobre, empli de tendresse et de pudeur, c'est aussi un livre qui dit beaucoup de choses autobiographiques certes, mais autobiographie qui se croise sans cesse avec l'Histoire (...) il y aura deux sortes de gens, ceux qui liront ce livre pour y trouver les mille anecdotes d'une vie d'artiste célèbre, ceux qui ne le liront pas pour les mêmes raisons, les premiers seront déçus, les seconds auraient tort." p.279
" Elle s'appelait Simone Signoret "France 5 diffusait la semaine dernière un documentaire consacré à Simone Signoret. Durant un peu moins d'une heure, plusieurs personnalités parmi lesquelles Guy Bedos, Fanny Cottençon et Anne Sinclair ainsi que la fille, Catherine Allégret, et le petit-fils, Benjamin Castaldi, de l'actrice ont croisé leurs regards sur la femme qu'elle était.
Ces interviews sont toutes reprises dans la biographie d'Emmanuelle Guilcher.
En marge de ces diverses interventions, on trouve dans ce documentaire de nombreuses photos prises à différentes époques, des extraits de films, de remises de prix et d'interviews données par l'actrice et par Yves Montand qui à travers l'image apparaît plus "macho" qu'il ne l'est dans le livre où ce constat demeurait plutôt inscrit entre les lignes.
Les multiples apparitions de Catherine Allégret m'ont fait réaliser à quel point celle-ci était absente de la biographie. Si elle bénéficie de plusieurs interventions, elle se veut quasiment éclipsée du récit. Rien de bien étonnant lorsqu'on apprend dans le documentaire qu'elle fut élevée par sa tante pendant que sa mère suivait Montand et défendait les libertés...
Catherine Allégret était par ailleurs l'invitée de l'émission "Thé ou Café" du 19 septembre consacrée à sa mère, émission que vous pouvez (re)voir
ici.
J'ai trouvé fort dommage que le documentaire ne consacre que les 10 dernières minutes à l'engagement politique de Simone Signoret pour se focaliser surtout sur sa relation avec Montand. J'imagine que c'est là un aspect qui intéresse moins le grand public...
Ma réaction à la fin du documentaire fut immédiate : "Quoi c'est tout?"
Ce documentaire est consultable
ici. Si il m'a permis de mettre certaines images sur des mots, je trouve qu'il ne constitue qu'une base sommaire pour qui s'intéresse à la femme plurielle.
" Les Diaboliques "Comme il me semblait difficile de me représenter vraiment l'actrice sans n'avoir jamais vu l'un de ses 50 (!) films, j'ai choisi de regarder "Les Diaboliques" ( adapté d'un roman de Boileau-Narcejac) dont je me rappelais vaguement l'histoire en raison de son adaptation sortie en 1996, "Diabolique", qui réunissait à l'écran Sharon Stone et Isabelle Adjani.
Réalisé par Henri-Georges Clouzot en 1955, "Les Diaboliques" désignent deux femmes, Nicole et Christina, qui unies par leur amour pour le même homme décident de l'assassiner pour mettre un point final à sa cruauté.
Mais Christina - l'épouse - a le coeur fragile et c'est donc à Nicole - la maîtresse - que revient de faire tout le sale boulot.
Malheureusement, les choses ne se passent pas exactement comme prévu...
Je ne vous en dirai pas plus car comme le signale la mention en fin de film : " Ne soyez pas diaboliques ! Ne détruisez pas l'intérêt que pourraient prendre vos amis à ce film.
Ne leur racontez pas ce que vous avez vu. Merci pour eux".
Simone Signoret était connue pour camper des personnages sombres, des femmes fatales, des prostituées, des femmes brisées par la vie qui attirent peu la sympathie.
Le personnage insensible de Nicole Horner ne fait pas exception et il est difficile de ne pas se rendre compte de la magnifique prestation de Simone Signoret tant celle-ci crève l'écran !
Malgré le noir et blanc et l'absence totale de musique, j'ai été complètement happée par cette histoire diabolique comme son nom l'indique et je n'ai pour ainsi dire pas pu reprendre mon souffle une seconde, surtout dans les 10 dernières minutes où les portes ne cessent de grincer.
Bien sûr, j'ai aussi bien ri de certains aspects surannés du film (la morgue et toutes ses portes ou encore le même faux paysage qui défile durant les passages en voiture) et des réactions de certains personnages secondaires.
Le trailer vaut également son pesant de cacahuètes ^^
Ce qui est certain, c'est que je vous recommande vivement de vous pencher sur Simone Signoret, que ce soit au détour de ce film ou d'un autre ou encore de cette magnifique biographie !
D'autres avis :
Pascale -
Lili Galipette -
PralineUn grand MERCI aux éditions
de m'avoir offert ce livre !