"Séquestrée" est un thriller signé par l'américaine Chevy Stevens, publié chez France Loisirs en début d'année sous le titre "La cabane de l'enfer" et ré-édité ce mois-ci par les éditions l'Archipel.
La vie tranquille d'Annie O'Sullivan, agent immobilier, bascule lorsque celle-ci se fait kidnapper par un homme à l'issue d'une journée portes ouvertes.
Enfermée à double tour dans une cabane en rondins perdue en pleine forêt, Annie s'est vue forcée de se plier aux 4 volontés et de subir les sévices de celui qu'elle ne cessera de nommer le "Monstre".
Le calvaire prend fin au bout d'un an pour laisser place à un autre cauchemar : la réalité, autre, angoissante, marquée durablement par de lourdes séquelles dont Annie peine à se défaire.
J'avais normalement d'autres lectures prévues avant celle-ci mais les avis positifs postés ici et là m'ont convaincue de remonter ce thriller dans ma pile.
Et je dois dire que je ne regrette pas ce choix !
A travers une vingtaine de chapitres correspondant chacun à une séance de psychothérapie, Chevy Stevens nous plonge dans l'esprit torturé de son héroïne qui tout au long de son monologue, raconte les souvenirs de sa détention, mêlés aux flashs-backs de son enfance.
Annie apparaît de prime abord comme une femme qui n'a pas la langue dans sa poche.
C'est une femme en colère mais aussi une victime insécurisée, paranoïaque, traumatisée par les rituels et la cruauté mentale infligée quotidiennement par un détraqué.
La façon dont cette femme traverse certaines épreuves m'a parfois fait penser à une forme de renoncement.
N'ayant (heureusement !) jamais vécu ce genre de drame, il m'a parfois été difficile de concevoir que l'instinct de survie puisse prévaloir sur le maintien d'une certaine dignité.
Or Annie n'avait nul autre choix que l'abandon de soi, toute autre démarche aurait été suicidaire.
" J'ai fait pas mal de trucs dans cet endroit maudit. Des trucs que je n'avais pas envie de faire, des trucs que je ne me serais jamais crue capable de faire.
Mais cette fois-là, je crois que j'ai battu tous les records. Chaque fois que je me pose la question de savoir comment j'ai pu devenir le zombie que je suis aujourd'hui, je repense invariablement à ce moment.
A cet instant où j'ai ouvert au diable la porte de mon âme." p.58
Bien que j'aie parfois eu un peu de mal à accepter les réactions d'Annie envers son tortionnaire, je me suis sentie en totale empathie en regard des situations décrites, ayant l'impression de vivre par procuration le cauchemar éveillé de bon nombre de femmes.
Le style se veut fluide, pas exceptionnel mais finalement juste, étant donné le caractère spontané du rapport patient-psy qui se dispense de formulations complexes.
Les pages se tournaient toutes seules ! Il fallait que je connaisse l'issue de cette histoire, preuve que ce thriller fut bien efficace !
Un sentiment que je n'avais plus éprouvé depuis ma lecture de "Robe de marié" de Pierre Lemaître.
Contrairement à d'autres lectrices, je n'ai absolument pas deviné la fin. Peu m'importait d'ailleurs car ce qui m'intéressait surtout résidait dans "l'après".
Comment se reconstruit-t-on après avoir vécu de telles atrocités ?
En ce sens, j'ai trouvé très à propos la finesse avec laquelle l'auteure abordait la culpabilité et le repli sur soi rencontrés en situation de stress post-traumatique, la difficulté de ré-apprendre à vivre, au-delà de la simple survie.
Bref, un excellent thriller qui a dépassé mes espérances !
D'autres avis : Mango - Liliba - Canel - George
MERCI aux éditions de m'avoir offert ce livre !