31 décembre 2010

Bilan Challenges 2010

L'année se terminant, le moment est venu de passer au bilan...Durant cette année 2010, je me suis inscrite à pas moins de 21 challenges (!!!) soit 13 de plus que l'an dernier (!!!)
Résultat des courses (oui parce que quand on ambitionne de venir à bout de tous ces défis, cela devient une course...) :

Du côté des challenges qui se clôturent en 2010


Challenge lancé par Saphoo
9/1






Un challenge auquel j'ai vraiment pris plaisir à participer car il m'a permis de découvrir de nouvelles plumes prometteuses telles que Victor Rizman et Hélène Grémillon.



Challenge lancé par La plume et la page
3/3




Un challenge qui aurait du me faire découvrir Herta Müller mais à laquelle j'ai finalement préféré Stefan Zweig (ai-je besoin d'en préciser les raisons? :))



Challenge lancé par Fashion
5/1





J'aime beaucoup l'enchaînement roman-adaptation cinématographique et, challenge ou non, je continuerai à publier ce genre de billets quand j'en ai l'occasion.



Challenge lancé par Pimpi
2/1



Mon billet sur "Guerre et Paix" aurait du paraître aujourd'hui mais je n'ai malheureusement pas eu assez de temps à consacrer à cette lecture. Ce n'est que partie remise car j'ai bien l'intention de lire Tolstoï (j'ai d'ailleurs acheté "Anna Karénine" il y a peu !) Affaire à suivre donc...



Challenge lancé par Karine:)
7/2




Un challenge qui m'a permis de découvrir des classiques anglais tels que "Jane Eyre" ou "Orgueils et préjugés". Je ne compte d'ailleurs pas en rester là :)



Challenge lancé par Karine:) et Caroline
2/2



Pour terminer ce challenge, il me manquait la lecture des Correspondances du bonhomme. Là encore, cela viendra !



Challenge lancé par Marie-L
20/13


Un classique à lire chaque mois durant un an, sans doute le challenge qui m'a semblé le moins contraignant étant donné que j'étais résolue à "lire des gens morts" de toute façon ( et puis c'est bien plus pratique, ils sont toujours d'accord avec le contenu de mes billets :))




Challenge lancé par Yoshi73
2/2





Je ne connaissais pas Jacques Chessex, ce challenge m'a donc permis de combler l'une de mes nombreuses lacunes !



Challenge lancé par Lecteurs compulsifs
8/6




Là encore, je sais que je continuerai à découvrir la littérature américaine, classique ou non, et en ce sens, ce challenge représentait du pain béni !



Challenge lancé par Livraddict
3/5




5 romans que j'avais prévu de lire cette année. Il me reste "La Voleuse de livres" (entamé mais pas terminé) et "Les Hauts de Hurle-Vent" dans lequel j'ai hâte de me plonger !


Challenge lancé par Fashion
1/1






THE challenge farce qui m'a non seulement permis de découvrir un vrai Harlequin et d'en parler (presque) sans honte mais qui a également donné lieu à une nouvelle de mon cru que j'ai pris beaucoup de plaisir à rédiger ! (Au fait, qui est le gagnant?)


Challenge lancé par Daniel
0/2


Mon rendez-vous manqué de 2010 mais San Antonio viendra en temps et en heure :)

Du côté des challenges à durée illimitée ou qui se clôturent en 2011




Challenge lancé par moi
13/37




J'aime toujours autant ces collections à prix mini qui permettent aux lecteurs de se faire une idée de l'univers d'un auteur. J'ai encore dans mes tablettes une vingtaine d'ouvrages qui ne demandent qu'à être lus !
(PS : le récapitulatif est à jour, enfin je crois...)




Challenge lancé par Raison et sentiments
3/13





De nombreux titres me font encore de l'oeil dans cette liste, notamment "L'homme invisible" et "Le vieil homme et la mer" !



Challenge lancé par George
1/4




Une auteure au style percutant que j'ai découvert grâce à ce challenge ! Il n'est pas impossible que je lise plusieurs de ses oeuvres d'ici le mois de mars !



Challenge lancé par Theoma
5/7



Bon nombre de vos coups de coeur figurent dans ma PAL. Je pense donc sans trop m'avancer que je dépasserai le nombre prévu :)


Challenge lancé par Choco
7/12





Je m'étais inscrite pour 3 puis pour 6 titres et voilà que ma PAL me signale que j'ai de quoi arriver à au moins 12 titres. La littérature japonaise reste encore un mystère pour moi mais je compte bien lui consacrer quelques heures de lecture supplémentaires !

Challenge lancé par Anneso
4/3-4






Un challenge que j'ai officiellement terminé mais étant donné mon affection pour le genre, je ne compte pas m'arrêter en si bon chemin !


Challenge lancé par Schlabaya
12 (+ deux biographies)/7







Il me reste "Apocalypse bébé" et "La vie extraordinaire des gens ordinaires" pour atteindre les 2%. Je pense que ce sera tout pour cette rentrée littéraire (même si il est possible que je lise le dernier Houellebecq/Nothomb/Claudel dans un avenir plus ou moins proche).


Challenge lancé par Reka
0/3






Thomas Gunzig, Nicolas Ancion, Jacqueline Harpman, Nadine Monfils, des auteurs de mon pays à (re) découvrir et à vous faire connaître !


Challenge lancé par Fashion
0/1






L'intitulé et les conditions de ce challenge m'ont tellement fait rire que je me suis résolue à m'inscrire (beaucoup de titres de ma PAL entrent dans ce challenge, ce qui ma foi tombe plutôt bien ! )

L'année 2011 promet d'être beaucoup plus calme puisque je ne compte plus participer à d'autres challenges que ceux pour lesquels je me suis déjà engagée. Les challenges sont des initiatives intéressantes dans la mesure où ils permettent de découvrir une thématique, un pays ou plusieurs oeuvres d'un même auteur.
Je ne remets donc aucunement en question leur pertinence mais bien la pression que ceux-ci peuvent exercer sur la lectrice que je suis.
Le mois passé, alors que je dressais un bilan de ce qu'il me restait à lire pour clôturer mes différents challenges, je me suis rendue compte que je n'avais pas forcément envie de lire ces titres-là tout de suite.
Loin de moi l'envie de risquer de passer à côté d'un livre faute de temps ou d'attention voire d'entacher mon plaisir de lecture pour quelques gommettes virtuelles.
Au terme de l'année écoulée, j'ai réalisé que mes habitudes de lecture avaient changé, sans cesse plus guidées par des délais supplémentaires (partenariats, lectures communes, challenges,...).
Sans aucunement renoncer à ces formes d'échanges que je trouve malgré tout fort gratifiants, je veux à présent éviter de trop me mettre sur le dos et ainsi retrouver la joie de pouvoir piocher un livre au gré de mon envie du moment. Le plaisir de lecture sans contraintes, en somme le rêve de tout lecteur :)

Je vous souhaite à tous et toutes une excellente année 2011 et des lectures qui vous feront vibrer !

Double Rêve - Arthur Schnitzler


"Double Rêve" est une nouvelle signée de l'autrichien Arthur Schnitzler. Parue en 1925, elle a largement inspiré Stanley Kubrick pour son fameux film "Eyes Wide Shut".
A Vienne, Fridolin, médecin, et Albertine, mère au foyer, forment un couple bourgeois sans histoires. Le lendemain d'un bal masqué, Albertine revient sur les événements de la soirée.
Tandis que son mari s'affichait en compagnie de deux créatures plantureuses, Albertine se voyait courtisée par un riche notable.
Tous deux grossissent volontairement les faits afin d'attiser la jalousie de l'autre. Commence alors pour l'un comme pour l'autre une véritable quête qui bouleversera leurs acquits de couple.

J'ai éprouvé d'étranges sensations en lisant cette nouvelle. Comme son nom l'indique, il est question de l'univers onirique d'un homme et d'une femme mais également de la confusion constante qui semble s'opérer entre rêve et réalité.
Suite aux révélations de son épouse, Fridolin éprouve une jalousie qu'il feint de pouvoir contenir mais qui le mènera dans les rues de Vienne, à la recherche de plaisirs auxquels il ne cèdera cependant jamais.
"Double Rêve" apparaît comme un voyage initiatique au coeur de toutes les tentations. Le lecteur suit Fridolin au gré de ses pérégrinations nocturnes, de ses fantasmes et de ses rencontres avec des femmes énigmatiques, exprimés sous la forme de monologues intérieurs.
Il pose en toile de fond la question de l'importance de la communication au sein du couple - faut-il absolument tout se dire, abolir toute forme de jardin secret au risque de blesser l'autre et de mettre en danger son couple? - comme celle de la faculté de deux êtres à pouvoir exister librement en dehors de la sphère conjugale.

" Car même s'ils s'appartenaient corps et âme, ils savaient qu'hier, et ce n'était pas la première fois, un souffle d'aventure, de liberté et de danger les avait effleurés ; pris à la fois par la crainte, le désir de se tourmenter et une déloyale curiosité, ils essayaient de soutirer à l'autre des révélations et, se rapprochant avec une certaine angoisse, chacun cherchait en soi un fait quelconque, même sans importance, un événement, même insignifiant, qui aurait pu passer pour l'expression de l'indicible et dont l'aveu honnête aurait peut-être pu les délivrer d'une tension mais aussi d'une méfiance qui commençaient à devenir insupportables." p.25

Mystère, sensualité, érotisme latent, chaque ligne joue volontairement sur une ambiguïté qui tend à balader le lecteur entre réalité et fiction. Si la langue se veut classique, le sujet lui demeure d'actualité et je ne peux que saluer la finesse de l'analyse du couple dont l'auteur a su faire preuve en regard de son époque. Son amitié avec Stefan Zweig y serait-elle pour quelque chose? :)

" Plus elle avait avancé dans son récit, plus ce qu'il avait vécu lui était apparu ridicule et dérisoire, du moins jusqu'au stade où il était allé, et il se jura de vivre toutes ces aventures jusqu'au bout, de lui en faire ensuite un récit fidèle et de prendre ainsi sa revanche sur cette femme qui, dans son rêve, s'était dévoilée telle qu'elle était, infidèle, cruelle et traîtresse, et qu'il croyait haïr en cet instant plus profondément qu'il ne l'avait jamais aimée." p.122

D'autres avis : Cachou - Val - Caro(line)

30 décembre 2010

Confessions d'un fumeur de tabac français - Roland Dubillard


Rédigé en 1974, "Confessions d'un fumeur de tabac français" est le journal tenu par l'écrivain français Roland Dubillard alors qu'il tentait de se débarrasser de son addiction à la cigarette.

Contrairement à Fabrice Valantine, héros du désormais célèbre "Fume et tue", le narrateur ne tue ici rien d'autre que le temps, notion qui, comme chaque fumeur repenti ou non le sait, s'avère des plus cruelles en période de sevrage.
Le narrateur n'en est pas à son premier coup d'essai mais cette fois-ci c'est certain, dresser la chronique de son combat quotidien le fera parvenir à ses fins !
En une petite centaine de pages, il nous dispense dès lors ses pensées présentées en vrac au fil de 14 journées qui verront se succéder la peur de faillir, la difficulté à changer ses habitudes et à se concentrer sur autre chose que sur l'abstinence, le caractère irremplaçable de cet objet pourtant si futile qu'est la cigarette, la mauvaise foi et la solitude dans laquelle le plonge cette démarche d'autant plus pénible qu'elle se doit d'être définitive pour être considérée comme réussie.

Continuer à arrêter, jour après jour, est devenu son obsession et une source d'angoisse permanente. Fumeur, il ne se posait pas de questions sur sa condition.
Mais voilà qu'il porte un regard neuf sur le monde maintenant qu'il se trouve de l'autre côté de la barrière. De nouvelles sensations olfactives apparaissent. A moins qu'il ne s'agisse en fait d'odeurs oubliées par des années de tabagisme?

" La cigarette creuse, avec son bout allumé, un terrier dans lequel il est possible d'oublier l'urgence du monde.
Il y a de la magie dans cette petite chose dont on ne parle pas. Ce soir, dans le métro, à la pensée que je n'allais pas fumer, il m'a soudain paru qu'il fallait un grand courage pour accepter le monde comme ça tout de suite. Tant qu'on accomplit cet acte futile, on se sent dispensé de vivre sérieusement, c'est-à-dire comme si on existait, comme si on était né.
Non par ses effets, mais par sa combustion même, le tabac est l'oubli, comme l'alcool." p.36

Il ne faut pas voir en ce petit opus une méthode miraculeuse pour arrêter de fumer mais le récit d'une expérience singulière.
Le narrateur s'intéresse ici au rapport étroit, intime même, qui unit le fumeur à la cigarette, objet qu'il met volontiers en parallèle avec Béatrice, cette femme tentatrice qu'il observe avec convoitise et qui représente pour lui une seconde source de frustration.

" La pipe est un objet. C'est l'adjectif possessif du tabac. Elle demeure, alors que du tabac rien ne séjourne. Elle vieillit.
Cette cigarette, l'essentiel est qu'elle soit fumée, peu importe par qui. Mais ma pipe, je la garde dans un tiroir. On prête une femme, on ne prête pas le désir qu'on a pu avoir d'elle, ni l'organe de ce désir." p.91

"
Ce n'est pas d'un vêtement qu'on manque quand on est tout nu; c'est d'un regard; qu'on le craigne ou qu'on le souhaite; qu'il soit seulement possible ou qu'il soit réel, incarné dans un oeil; ou qu'il soit rêvé.
Ainsi, ce que j'appelle ma faim cessait de se promener décemment, presque invisible, dans sa robe de fumée. Elle était nue.
" p.106

Sur base de principes philosophiques - que je n'arrivais pas toujours à suivre je l'avoue - déclinés dans une forme avant tout poétique, le propos se veut dénué de tout jugement critique et illustre parfaitement la contradiction rejet/désir qui opère en chacun de nous lorsqu'il est question de plaisir et d'addiction.

Et pour ceux qui voudraient s'essayer aux bonnes résolutions pour l'année à venir ;)




24 décembre 2010

Les Visages - Jesse Kellerman (livre audio)


Paru en 2008 aux USA et traduit en français en 2009, "Les Visages" est le troisième roman de l'écrivain américain Jesse Kellerman.

Ethan Muller, 32 ans, tient une galerie d'art à Chelsea. Lorsque Tony, le bras droit de son père, lui propose de se déplacer pour venir admirer les dessins d'un artiste, Ethan commence par refuser compte tenu des liens ténus qu'il entretient avec son père.
Finalement, intrigué, il monte dans un taxi pour rejoindre Tony dans un appartement lugubre situé dans le Queens.
Sur place, il découvre plusieurs centaines de boîtes remplies de dessins numérotés représentant des visages d'enfants d'un réalisme troublant.
L'artiste, Victor Cracke, a disparu mais malgré le succès de son exposition, Ethan n'est pas décidé à en rester là.
Aidé d'un inspecteur à la retraite et de sa fille, il découvre que ces dessins évoquent trait pour trait plusieurs enfants assassinés bien des années plus tôt.
Mais où se cache donc Victor Cracke?

"Les Visages" était ma première expérience avec le livre audio et, je ne sais si cela tient à la spécificité dudit format ou à la densité de cette histoire, mais ce premier essai fut pour moi assez laborieux.
Le boîtier annonçait une durée totale de 14h. J'avais donc prévu une écoute étalée sur une semaine, à raison de 2h par jour. Que nenni !
Confortablement installée dans mon canapé, j'entamais ma première heure d'écoute.
Tandis que je me laissais happer par la voix du narrateur, j'ai rapidement cherché quoi faire de mes petites mains, chose que je n'arrivais pas vraiment à m'expliquer étant donné que ce genre de souci ne se pose pas lorsque je regarde un film.
La position de lectrice écoutant une histoire par l'intermédiaire d'un lecteur expose à une certaine passivité au sens où il n'y a pas d'"effort de lecture" comme c'est le cas lorsqu'il nous faut identifier chaque mot dans un livre papier.
Bref, au bout d'une heure, je lâchais l'affaire pour retourner à mon traditionnel objet "Guttenberg" comme dirait l'autre.
Ce roman a donc malheureusement fait l'objet d'une écoute saccadée et, en y pensant, je me dis que la (trop lente) progression de l'histoire a certainement joué un rôle dans ce découragement.
Je renouvellerai toutefois l'expérience, sans doute avec un livre plus court.

"Les Visages" apparaît comme la confession d'Ethan Muller, un trentenaire ressenti comme narcissique et cynique, du genre à porter un regard critique sur tout et sur tout le monde.
Etant donné que la narration se fait dans un style oral mené à la 1ère personne, j'ai trouvé qu'en ce sens le roman se prêtait plutôt bien à l'écoute.
Si au départ il est question d'une enquête, j'ai eu tendance à oublier cet aspect de l'histoire tant ce que je pensais être des digressions fusaient de toutes parts.
Plusieurs interludes interviennent dans le récit au point que je qualifierais aussi (et surtout) ce roman de saga familiale.
En effet, il est grandement question de la famille Muller et des ancêtres d'Ethan. Déconcertée au départ, je me demandais ce qui pouvait motiver l'auteur à dresser ses ponts généalogiques.
J'ai ensuite compris en quoi ils étaient liés à l'affaire qui occupait Ethan.
Mais je ne développerai pas cet aspect de l'histoire au risque de vous dévoiler le fil de l'intrigue.

Le lecteur suit donc Ethan dans son enquête qui va de pair avec une quête identitaire. Outre deux femmes qui lui causent bien des soucis, la vie d'Ethan semble être guidée par deux choses : la haine de son père et l'art, particulièrement celui de Victor Cracke vis-à-vis duquel il nourrit une véritable obsession.
Il n'est d'ailleurs pas rare qu'Ethan exprime son avis sur ce que devrait ou non être l'art en évoquant des personnalités telles que Duchamp ou Borgès et qu'il soulève toute la superficialité du milieu mondain dans lequel il évolue, un monde au sein duquel l'art se veut davantage perçu pour ce qu'il représente (financièrement) que pour ce qu'il est.

Mais l'enquête dans tout ça? Qu'en est-il de Victor Cracke, de ses dessins et des enfants assassinés? C'est justement là que le bat blesse selon moi.
J'ai trouvé la progression de l'enquête beaucoup trop lente, ennuyée que j'étais par les propos d'Ethan qui soulevaient davantage de nouvelles questions qu'ils n'apportaient de réponses.
A croire que le narrateur - Ethan -(et l'auteur) semblait trouver un malin plaisir à tirer cette histoire en longueur pour pouvoir monopoliser l'attention du lecteur le plus longtemps possible, ce qui concorde finalement assez bien avec l'égocentrisme d'Ethan.

J'ai trouvé l'écriture de Jesse Kellerman particulièrement soignée et précise (parfois un peu trop!), j'ai aimé le portrait de Victor Cracke ainsi que les considérations sur l'art en général mais mon enthousiasme s'est vu freiné par l'extrême lenteur de l'enquête. Dommage...

Plein d'autres avis chez BOB !

MERCI à de m'avoir offert ce livre !

22 décembre 2010

La pluie, avant qu'elle tombe - Jonathan Coe


Après plusieurs romans tels que le célèbre "Testament à l'anglaise" ou encore "La maison du sommeil", "La pluie, avant qu'elle tombe" est le 8ème et dernier roman en date, paru en 2007 et traduit en français en 2009, de l'écrivain britannique Jonathan Coe.

Suite à la mort de sa tante Rosamond, Gill retourne dans le Shropshire pour assister aux funérailles et vider la maison.
Alors qu'elle pénètre les lieux, elle tombe sur des albums photo ainsi que sur plusieurs cassettes enregistrées par Rosamond peu avant son décès. Une note figure sur l'un des boîtiers : " Gill, Ces cassettes sont pour Imogen. Si tu ne la retrouves pas, écoute-les toi-même".
Imogen, la petite fille aveugle que Gill avait croisé autrefois, est introuvable. Aussi Gill entreprend-t-elle d'écouter les enregistrements qui renferment 20 descriptions réalisées à partir d'anciennes photos et qui en disent long sur le passé des uns et des autres...

Je ne connaissais Jonathan Coe que de nom mais, en voyant les avis postés ici et là sur ce roman, j'avais hâte de faire connaissance avec cet auteur !
"La pluie, avant qu'elle tombe" constitue le testament de Rosamond légué à la petite Imogen.
J'ai beaucoup aimé le schéma narratif de ce roman. Etant donné qu'il est question de 20 photos ni plus ni moins, le chapitrage s'est imposé naturellement. Le récit n'en est pas pour autant linéaire car si les anecdotes se suivent, elles ne se ressemblent guère.
Bien sûr au départ, il est question pour Rosamond de décrire de son mieux les différents éléments qui composent la photo, l'occasion pour l'auteur de convoquer des images d'une infime précision et qui donnent assurément un certain relief au récit.
Les détails fournis par Rosamond n'ont rien d'anodin et concourent à dresser l'envers du décor, les différents niveaux de lecture de chaque photo pour soulever le climat glacial dans lequel baignent les différents personnages.
Les propos de Rosamond se révèlent teintés d'une mélancolie qui n'échappe pas à un certain cynisme, rien de plus normal lorsque l'on connaît les tenants et aboutissants de cette histoire traversée par 3 générations de femmes à qui le manque d'amour maternel fait cruellement défaut.
Mal aimées, irresponsables, lunatiques, toutes ont choisi de préférer un homme à leur propre enfant, pour s'en mordre les doigts, malheureusement trop tard, et céder la place à la suivante.
Et au milieu du jeu de quilles, Rosamond, cette femme qui essaiera toute sa vie de réparer les pots cassés, toujours à la recherche d'affection, et se voudra systématiquement mal reçue et manipulée. Une femme restée malgré tout sentimentale et à laquelle on ne peut que s'attacher.

J'ai été soufflée par la faculté de l'auteur à s'emparer d'un sujet aussi...féminin jusque dans sa sphère la plus intime, un don que je n'avais jusque là constaté que chez Stefan Zweig.
On sent également chez Jonathan Coe un goût accru pour le déterminisme dans cette façon de présenter ces différents destins comme liés par un sort indéfectible.
Dans la mesure où cette fatalité s'avère être le fil conducteur de l'histoire, cela ne m'a pas dérangée outre mesure sauf - et c'est là le seul bémol de ce roman selon moi - à la toute fin de l'histoire où il est question d'une énième coïncidence (ceux/celles qui l'ont lu se souviendront de l'épisode du chien !) que j'ai trouvée beaucoup trop grosse et qui selon moi était superflue.

Ce petit bémol mis à part, j'ai vraiment été enchantée par cette lecture !

" Je revois Thea fronçant les sourcils en méditant ces paroles, et puis elle a proclamé : "Eh bien moi, j'aime la pluie avant qu'elle tombe." Rebecca s'est contentée de sourire, mais moi j'ai répliqué (de façon assez pédante, je suppose) : "Tu sais, ma chérie, avant qu'elle tombe, ce n'est pas vraiment de la pluie. - Qu'est-ce que c'est alors?" Et j'ai expliqué : " C'est de l'humidité, rien de plus. De l'humidité dans les nuages." Thea a baissé les yeux et s'est de nouveau affairée à trier les galets de la plage : elle en a ramassé deux et s'est mise à les frapper l'un contre l'autre.
Elle semblait trouver plaisir à ce bruit et à ce contact. J'ai continué : "Tu comprends, ça n'existe pas, la pluie, avant qu'elle tombe, sinon ça n'est pas de la pluie."
C'était un peu ridicule de vouloir expliquer ça à une enfant, et je regrettais de m'être lancée là-dedans. Mais Thea ne semblait avoir aucun mal à saisir ce concept - bien au contraire : au bout de quelques instants, elle m'a regardée avec pitié en secouant la tête, comme si c'était éprouvant pour elle de discuter de ces matières avec quelqu'un d'aussi obtus.
" Bien sûr que ça n'existe pas, elle a dit. C'est bien pour ça que c'est ma préférée. Une chose n'a pas besoin d'exister pour rendre les gens heureux, pas vrai?"
Et puis elle a couru dans l'eau avec un sourire jusqu'aux oreilles, ravie que sa logique lui ait valu une si insolente victoire." p.164

"La pluie, avant qu'elle tombe" était une lecture commune avec Liliba que je remercie de m'avoir attendue et dont je file découvrir le billet.
Merci à Choco pour ce cadeau offert à Bruxelles :)

D'autres avis chez BOB !