"Lady Susan" est un court roman épistolaire, oeuvre de jeunesse rédigée en 1793 par la célèbre romancière anglaise Jane Austen.
A travers une quarantaine de lettres, Jane Austen dresse le portrait de Lady Susan Vernon, une jeune veuve aussi peu éplorée qu'elle est mauvaise mère...
Alors que Lady Susan rejoint son frère Charles Vernon à Churchill, elle y fait la rencontre de Réginald de Courcy, le frère de sa belle-soeur Catherine Vernon.
Sa belle-soeur, qui n'a jamais pu supporter Lady Susan, tente par tous les moyens d'éloigner son frère de la maison avant qu'il ne s'entiche réellement de cette veuve sans scrupules.
De son côté Lady Susan, avec la complicité de son amie Alicia Johnson, multiplie les ruses afin de marier sa fille Frederica, qu'elle a préféré envoyer en pension plutôt que de veiller elle-même à son éducation, à Sir James Martin, un homme dénué d'intelligence mais néanmoins un bon parti.
Comme il s'agit d'un roman épistolaire (court de surcroît), le lecteur fait la connaissance des différents personnages au même moment qu'il découvre leurs lettres, ce qui suscite une certaine confusion des noms au début ( c'est d'ailleurs ce que reprochent généralement certains lecteurs au genre épistolaire).
Heureusement, les personnages sont suffisamment récurrents et bien décrits que le lecteur a tôt fait de comprendre qui est qui.
Autant dire que ça caquette à tout-va dans ce roman! 11 ans après "Les liaisons dangereuses" de Choderlos de Laclos, Jane Austen a trouvé en Lady Susan sa marquise de Merteuil.
Voici une manipulatrice hors-pair qui a pour seul souci la bienséance et parvient à mettre tout le monde à ses bottes par le simple usage de la parole.
Tout le monde à l'exception de sa belle-soeur et de sa propre fille qui n'ont foi en sa prétendue sincérité car, contrairement à tous les autres, Lady Susan s'est conduite avec elles de manière ouvertement méprisante.
Plusieurs fois je me suis surprise à prononcer à haute voix "Oh la garce!" tout en souriant de l'ingéniosité de ses manigances et multiples pirouettes. Le moins que l'on puisse dire est qu'elle a un sacré toupet!
"Certaines mères auraient insisté pour obtenir de leurs filles l'acceptation d'une offre aussi avantageuse dès les premières ouvertures.
Moi, je n'ai pu en conscience contraindre Frederica à un mariage auquel son coeur refusait de se soumettre et, au lieu d'avoir recours à des mesures aussi rigoureuses, je me propose seulement de l'incliner à ce choix en rendant sa vie parfaitement insupportable aussi longtemps qu'elle n'aura pas accepté ce parti.
Mais assez sur le chapitre de cette fille assommante." p.25
"Humilié comme il l'est à présent, je ne peux lui pardonner une telle manifestation d'orgueil, et je me demande si je ne devrais pas le châtier en le congédiant sur-le-champ après la réconciliation que voilà, ou encore en l'épousant et en le faisant enrager toute la vie." p.85
Bien que j'ai beaucoup apprécié ce roman, j'ai tout de même deux remarques :
- J'ai trouvé certaines phrases extrêmement longues. Je pense surtout à certaines lettres dans lesquelles furent reproduits des dialogues que j'ai eu un certain mal à imaginer prononcés oralement tant leur longueur était impressionnante.
- Je m'attendais à une dernière lettre en guise de conclusion, non à une fin abrupte appelée d'ailleurs "conclusion" et visant à donner le point de vue de l'auteur sur ses personnages façon "moralité de l'histoire".
Cela étant dit, je reste béate d'admiration vis-à-vis de la qualité stylistique de ce roman écrit alors que l'auteure avait à peine 18 ans.
J'ai d'autant plus hâte de relire "Orgueil et préjugés"!
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