23 septembre 2010

Harlequinades 2010 : Orgie et préjugés (épisode 1) - Jane Ose Team


C'est une vérité universellement reconnue qu'un célibataire pourvu d'une belle fortune doit avoir envie de se vider les bourses, et si peu que l'on sache de son sentiment à cet égard, lorsqu'une jeune pousse se veut conviée à résidence, cette idée est si bien fixée dans l'esprit des voisins qu'ils la considèrent sur-le-champ comme la propriété intime de l'un ou l'autre de leurs fils.

La présence de Miss Bebett à Applefield Park ne relevait en rien du hasard. Pour des raisons qu'Elizabeth ignorait, sa pauvre mère grabataire avait conclu une obscure entente avec Miss Smith, la propriétaire des lieux.
C'est ainsi que Miss Bebett, sans avoir eu vent des clauses dudit contrat, se trouvait à présent dans cette immense demeure jouxtant une coopérative agricole des plus prolifiques.

- Miss Bebett, vous voilà enfin ! Avez-vous fait bon voyage ma chère enfant?
- Sans vouloir vous vexer en aucune manière madame, il m'aurait été plus agréable encore si je n'avais été à ce point dérangée.
- Dérangée dites-vous ! Des brigands s'en sont-ils pris à votre véhicule?
- Non, pas exactement. A dire vrai madame, ce sont les pommes que vous m'aviez si gentiment fait parvenir la semaine dernière qui ont eu raison de mes intestins. J'espère par cet aveu ne point m'exposer à votre courroux.
- Ah, c'était donc fort peu de choses ! Dieu merci, j'ai bien cru qu'il vous était arrivé quelque malheur ! Approchez donc mon enfant que je vous introduise à mon petit-fils. Fils William, laissez-moi vous présenter ma jeune amie Miss Elizabeth Bebett.
Elizabeth, voici l'être qui fait ma joie depuis trente printemps, mon petit-fils Fils William d'Aucy.
- Comme c'est curieux, à entendre son prénom, j'aurais cru qu'il s'agissait de votre fils.
- Oh comme vous flattez mon âge Miss Bebett !
- Non je parlais du prénom de votre...
- Peu importe, à quoi bon se soucier de telles futilités n'est-ce pas ?
- Ne faites pas trop attention à Grany, elle n'a plus toute sa tête.
- d'Aucy. J'ignorais que c'était là votre nom de famille.
- Il est d'origine française et me vient de mon défunt père qui m'a légué cette propriété. De nombreux légumes poussaient autrefois sur ces terres pour ensuite rejoindre la ville où ils étaient mis en conserve.
Mais un jour mon pauvre père, dieu ait son âme, est tombé gravement malade. Il est devenu méconnaissable, végétant toute la journée et se refusant à quitter le lit. Un vrai légume en somme, quelle ironie du sort !
Aussi à sa mort, je ne pus me résoudre à alimenter ce dernier souvenir en poursuivant le commerce de toute une vie.
J'ai donc choisi de cultiver des fruits sur ces terres, et plus particulièrement des pommes.
- Je suis certaine que votre père aurait apprécié que vous vous absteniez d'un tel hommage à sa funeste personne.
- Je le crois aussi. Fort heureusement, cette reconversion ne m'astreint guère à m'abstenir d'autres plaisirs.

Elizabeth fut si touchée par la noblesse d'âme de ce fils dévoué qu'elle sentit la fièvre empourprer ses joues tandis que Fils William nourrissait secrètement le dessein de la croquer à pleines dents.

- Je vois que vous avez pu faire connaissance avec mon cousin Fils William.
- Pardonnez-moi madame mais je crois que nous n'avons pas eu le plaisir de nous voir présentées.
- Mais bien sûr, je manque à tous mes devoirs ! Lady Marmelade. Fils William est mon cousin. Vous m'avez l'air d'une jeune femme respectable. Je suis certaine que vous et moi deviendrons de grandes amies.
- Votre cousin s'est montré d'une fort agréable compagnie à mon égard et vous semblez lui témoigner une affection sans précédent.
- En effet, Fils William et moi nous connaissons depuis l'enfance. Il aime être entouré de femmes c'est certain comme il est assurément vrai que vous entrez totalement dans ses goûts.
Vous ne trouverez donc rien d'étonnant à ce que, comme ce fut le cas pour cette chère Miss Tetley, mon tendre cousin pousse la courtoisie jusqu'à vous convier un jour ou l'autre à l'une de ses orgies.
- Orgies dites-vous?
- Votre candeur vous honore mais je crois que vous et moi savons parfaitement quel sens donner à ce mot, Elizabeth.

Lady Marmelade toisa Elizabeth d'un regard coquin avant de se retirer dans le jardin.
Elizabeth, plantée dans le salon, songea à l'impression qu'elle avait pu faussement donner à Fils William.
Comment cet homme qui s'était montré si charmant envers elle avait-il pu penser qu'elle se donnerait à lui si aisément? Etait-ce donc là le traitement réservé aux jeunes filles de la ville que d'être assimilées à des femmes de mauvaise vie?
Alors qu'Elizabeth s'offusquât qu'on lui attribuât si peu de vertu, elle sentit poindre en elle le désir coupable de satisfaire à l'image que Mr d'Aucy s'était formé de sa personne.
Mais quand bien même elle décidait de s'offrir à lui, elle refusait d'être considérée comme l'une de ces pommes fraîchement tombées de l'arbre et prêtes à atterrir directement dans le panier du premier mâle en rut.
Plongée dans ses pensées contradictoires, elle rejoignit le jardin et croisa Mr d'Aucy, affairé à la fabrication d'une nouvelle pomme.

- Que vois-je donc là Mr d'Aucy? Serait-ce une nouveauté?
- Tout à fait Miss Bebett. Il s'agit d'une pomme d'amour.
Une pomme bien mûre est enduite d'un liquide brûlant légèrement sucré qui durcit instantanément au contact de la chair.
- Voilà une idée fort intéressante issue d'une imagination assurément fertile. D'où la tenez-vous?
- C'est vous qui me l'avez inspirée, Elizabeth.
En vain ai-je lutté. Rien n'y fait. Je ne puis réprimer mes sentiments. Laissez-moi vous dire l'ardeur avec laquelle je vous admire et je vous aime.

Elizabeth stupéfaite plongea son regard dans les yeux vert pomme de ce bellâtre avenant, s'efforçant de réprimer ce sourire évocateur que sa condition ne l'autorisait à afficher ostensiblement.
Mais alors que Fils William détaillait avec envie la moindre parcelle de son anatomie, s'arrêtant à la naissance des deux abricots qui caractérisaient sa modeste poitrine qu'une blonde chevelure en grappe dissimulait à peine, Elizabeth songea aux conséquences désastreuses qui suivirent ce même élan fougueux quelques années plus tôt.
La jeune femme avait consenti à l'époque à se donner à l'élu de son coeur dont les prétentions s'avéraient en tout point identiques à celles de Mr d'Aucy.
Mais ce traître de Beckham lui avait finalement préféré sa jeune soeur Victoria dont les appétissants ballons de football étaient parvenus à concurrencer ses minuscules balles de golf.
Beckham avait atteint son but en choisissant Victoria et tous deux avaient filé en douce dans le Bedfordshire, laissant Elizabeth seule avec des complexes qui la poursuivaient depuis des années.
Non, malgré son envie pressante de se jeter à corps perdu dans une nouvelle idylle, la jeune femme ne cèderait pas aux avances de Mr d'Aucy, aussi divinement séduisant fut-il.
Mais soudain, Mr d'Aucy la plaqua contre un pommier et se plaça derrière elle...

Suite et fin demain, même endroit, même heure :)

17 commentaires:

  1. Oh mon dieu !!!! Je suis en larmes !!! C'est excellent, formidablement drôle, bravo !!!
    Vivement demain :)))

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  2. c'est l'amour au verger !!!! j'adore !!!

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  3. Muaaaaaahahaahahahahahhaahhahaaha!
    Jane, si tu nous lis, sache qu'on t'adore, mais que Cynthia a fait très fort!!
    Excellente réécriture et pastiche du texte orginal!
    La suiiiiiiiiiiiiiite!

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  4. Aaaaaaah, c'est génial ce que tu as écrit!! Je suis morte de rire!!!

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  5. Elisabeth Bebett et Lady Marmalade, tu as osé !!!! Morte de rire, je ne croquerai plus jamais dans une pomme sans penser à toi !

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  6. tout simplement épatant, vivement la suite !

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  7. @toutes : MERCI les filles, j'espère que la suite vous plaira tout autant !
    Rendez-vous dans quelques heures ;)

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  8. Hiiiiiiiii !!! J'adoooooore !!! ;-)

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  9. Cynthia ose!
    J'adore ce grand n'importe quoi un peu chaud quand même ...

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  10. Rien que la 1ère phrase donne le ton ! Bravo !!!

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  11. Un remake à la sauce harlequin, bravo !

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  12. Là tu as fait fort, il faut le dire :-D

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  13. Morte de rire!!! Digne d'être publié, rien de moins!

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  14. Le ton est donné dès le titre...et l'auteur !
    Excellent...j'adore
    Rho cela va être dur de voter !!!

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  15. Jane ose Team est une haute heure au poil mais je préfère Ed Hit War Tonne même si son style est parfois un peu lourd.

    Et as-tu déjà lu le duo Fred & Hic Bègue & Dé ? C'est répétitif...

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  16. @Cécile : je vois que tu es fin prête pour la prochaine édition ;)

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