20 février 2012

Arlette - Olivier Cabiro


Publié le 5 janvier dernier, "Arlette" est le premier roman de l'écrivain français Olivier Cabiro.

Tandis que sa femme Maria poursuit de longues études à Paris, Olivier travaille pour une banque au Pakistan.
Parmi les expatriés se trouve Arlette, belle et jeune danoise solaire et accessoirement mariée , dont Olivier tombe éperdument amoureux.
Au bout de plusieurs semaines de franche camaraderie, alors que le mari d'Arlette demande à Olivier de veiller sur son épouse lors de ses sorties en mer, tous deux tombent dans les bras l'un de l'autre.
Ce qui sonnait au départ comme une idylle de vacances se transforme en une histoire qui se poursuit à travers les continents et les années.

Deux raisons me décident généralement à ne pas terminer un livre : un style trop commun ou carrément déplaisant ou bien l'ennui que m'inspire une histoire jugée dès lors sans intérêt.
Dans le cas présent, ces deux caractéristiques se sont trouvées réunies dans un même roman et pourtant, je suis tout de même arrivée au bout de ma lecture. Pourquoi ?
Pour vous expliquer ce qui s'est passé avec ce livre, j'utiliserai l'exemple de la télévision.
Il m'est déjà arrivé de regarder un film ou une émission avec indifférence, me contentant de laisser défiler les images devant mes yeux.
Aurais-je eu mieux à faire que de me laisser passivement abrutir ? Sans doute.
Or, pour une raison que je ne m'expliquais pas totalement, je ne zappais pas et laissais mon esprit se remplir de vide jusqu'en fin de soirée.

La personnalité d'Olivier, le narrateur, m'est apparue très tôt. Dès l'instant où celui-ci évoque la relation à distance vécue avec sa femme Maria et son manque de motivation dans le travail, je me suis dit que cet homme-là était du genre à contempler sa vie, sans ambition de vouloir en changer, de bousculer l'ordre des choses pour pouvoir accéder au bonheur.
Mais Olivier sait-il seulement ce qui le rendrait heureux ? Pas vraiment.

" Il y a les types qui bâtissent l'avenir dès qu'ils ont un boulot, trois sous de côté et une copine.
Ils se marient, planifient leurs dépenses, réservent les vacances d'été à partir de novembre et, à l'horizon de trois ans, savent quel poste ils occuperont dans la boîte où ils travaillent.
Et puis il y a ceux dont l'existence épouse la suite des moments, des profits, des choses à saisir.
Ceux qu'on appelle à l'origine des aventuriers, c'est-à-dire, au sens propre, ceux qui prennent ce qui advient, ceux qui chevauchent l'occasion.
Comparé à Lars, j'appartenais clairement à cette deuxième catégorie, dans la sous-catégorie des contemplatifs, qui n'est pas la meilleure et qui consiste, en gros, à se promener dans l'existence.
Cela fait des gens très doués pour profiter du paysage mais pas toujours pour contrôler l'itinéraire. " p.98

Avant de rencontrer Arlette, sa vie était plutôt conventionnelle. Il exerçait un travail qui ne lui plaisait pas mais lui permettait de voir un peu du pays et de profiter d'un statut confortable d'expatrié.
Sa femme et lui ne s'aiment plus mais se raccrochent tant bien que mal à la promesse d'un avenir meilleur dès lors que Maria aura achevé ses études pour le rejoindre.
Avec Arlette arrive la passion, une passion d'autant plus exacerbée qu'elle prend place dans un contexte qui flaire bon l'interdit.
Dans un pays qui condamne l'adultère comme l'abus d'alcool, les amants s'enivrent et s'aiment aux yeux de tous, sans précaution aucune sous le regard amusé d'Arlette qui ne craint pas d'être jugée.
Si Olivier craint que les langues se délient au point que sa liaison avec Arlette arrive jusqu'aux oreilles de son mari, il semble faire peu de cas de sa femme, comme si leur couple était immuable.
Mais les rumeurs sur eux vont bon train. Olivier sera muté dans une succursale au Bangladesh et tous deux finiront par divorcer de leurs conjoints.
On aurait donc pu s'attendre à ce que ces deux là saisissent cette chance pour vivre leur amour librement. Or ce qui pesait sur leur avenir de couple n'était pas tant leurs engagements respectifs que la peur innommable d'Olivier.

Un coup de sang de quelques semaines (trop tôt pour parler d'amour) et 20 ans pour s'avouer que la passion des débuts s'est étiolée, telle fut mon impression à propos de ce roman.
Chaque coup de fil d'Arlette (elle seule l'appelle et lui écrit) succède à une visite à l'issue de laquelle Olivier se dit qu'il vaudrait mieux en rester là.
Arlette ne se cache pas d'aspirer à un certain train de vie, un penchant qu'Olivier juge de plus en plus sévèrement.
Ce constat m'a fait sourire dans la mesure où j'ai trouvé qu'Olivier était justement le plus superficiel des deux. Si Arlette aime briller en société et s'entiche d'hommes riches et influents, ses sentiments pour Olivier se veulent sincères.
Olivier lui s'est arrangé pour ne jamais rester longtemps au même endroit, se contentant d'aller là où le vent le mène, position qui lui permet d'enchaîner les rencontres éphémères et de ne pas trop s'impliquer dans ses relations.
Et pourtant lui vient toujours l'idée de vérifier si ses sentiments pour Arlette sont encore là, pour en "avoir le coeur net" comme il le répète à plusieurs reprises.
Bien qu'il soit conscient de cette confusion perpétuelle qui règne dans son esprit, je n'ai jamais ressenti dans ses propos autre chose qu'un simple constat.
A chaque fin de chapitre, j'avais l'impression qu'Arlette et lui étaient sur le point de passer à autre chose et au suivant, voilà que c'était reparti pour un tour.
Un grand sentiment de lassitude s'est donc emparé de moi au fil des pages.
A l'image de l'histoire, le style, certes fluide et pas déplaisant, n'a guère laissé de traces dans mon esprit.

" A se disperser vers tant de directions, ma vie pouvait paraître sans but à force d'en avoir. Elle avait pourtant un principe : goûter à tous les types d'existence. Chercher partout la saveur, la consistance, acquérir la palette de goûts la plus complète afin, au bout du compte, d'obtenir LA connaissance.
En fait, comme tout principe d'existence, le mien ne pouvait être suivi qu'au détriment d'un aspect de la réalité. Je cherchais la saveur profonde de la réalité, bien.
Sa variété dans tous les modes de vie possible, très bien. Mais dès qu'on s'attache à parcourir la palette des modes d'existence, on ne peut s'investir totalement dans aucune, on les effleure.
Avantage : contrairement à ceux qui s'investissent sans voir les choses passer, on prend le temps de les détailler, d'en savourer le goût.
Inconvénient : on n'est jamais sûr que ce soit leur vrai goût puisqu'on n'y est pas totalement investi. Une histoire de fou. " p.145



MERCI à et aux éditions de m'avoir offert ce livre !

1 commentaire: