Publié en 2010, "Si peu d'endroits confortables" est le premier roman de l'écrivaine française Fanny Salmeron, également auteure des romans "Le Travail des nuages" (2011) et "Les Etourneaux" (2013).
Joss et Hannah errent tels deux âmes en peine dans ce Paris "sombre", "minuscule", "bruyant", "brouillon", qui "rend tout le monde invisible". Lui y cherche sa place, elle y a perdu la sienne.
Leurs solitudes se rencontrent et se reconnaissent.
Hannah compte les dimanches qui la séparent d'*, son amour parti à Londres sans elle. Elle lui écrit ses chagrins et ses espoirs dans un carnet bleu et marque les bancs, les arbres, les trottoirs de sa détresse à l'aide de ces quelques mots "Il y a si peu d'endroits confortables".
Josh est peintre et espère trouver à Paris l'inspiration qui lui faisait défaut. Frappé au coeur par la fragilité d'Hannah, il accepte de venir s'installer chez elle, de remplacer l'absente dont Hannah ne cesse d'espérer le retour.
Parviendra-t-il à obtenir sa place dans ce coeur partagé entre attente et souvenirs ? Hannah et Joss se suffiront-ils l'un à l'autre ?
" Je ne sais pas si deux solitudes s'annulent, je ne sais pas si elles se consolent. Je ne sais pas si au contraire elles ne forment pas un vide encore plus grand." p.89
J'ai acheté ce roman uniquement sur base de la citation ci-dessus, relevée un jour lors de mes errances sur le net. Il est de plus en plus rare que je laisse mon seul instinct présider à l'achat d'un livre. Or dans ce cas-ci, ni avis, ni billet tentateur, tout juste une vague idée de l'histoire qui m'attendait.
Néanmoins, au moment de commencer ce roman, une petite appréhension devant son manque d'épaisseur : encore une déception à venir ?
A présent, je peux vraiment dire que ce petit roman m'aura prise par surprise du début à la fin...
Hannah et Joss s'expriment à tour de rôle et apparaissent comme deux enfants confrontés à la dureté du monde adulte.
Hannah ne parvient pas à "passer à autre chose", à oublier cet amour absolu et trop lourd à porter. Joss a beaucoup d'amour à offrir et fait tout ce qu'il peut pour rendre le sourire à Hannah, toujours en respectant sa détresse.
Mais l'aimerait-il autant si elle n'était justement pas cette Hannah là, cet être si fragile tout dévoué à son chagrin ?
" Tu comprends, j'ai besoin d'un autre nous. De quelque chose de plus doux. De plus simple. Sans les complications du corps. Sans la sueur et sans la faim, sans toutes ces choses épuisantes. Juste les jolies lumières de l'amour élémentaire.
Je n'ai plus envie d'être amoureuse. De toute façon tu prends toute la place. Je veux juste aimer simplement. Sans plus jamais mêler le ventre à ça." p.88
Malgré que le sort d'Hannah et de Joss soit scellé dès les premières lignes, j'ai cru jusqu'au bout au pouvoir guérisseur de la tendresse, peu importe la profondeur de la blessure ou le temps qu'elle prendrait à cicatriser.
" Oui, je saurais bien mieux être un enfant, mais je ne voudrais pas du tout redevenir une petite fille, parce que c'est être faible face au monde et ce n'est pas toujours une vie rêvée.
Quand on est faible les gens qu'on aime prennent des trains et ne reviennent plus pendant cent mille dimanches. Ils ne reviennent pas non plus les jours d'après." p.132
Je me suis retrouvée totalement prise au dépourvu, ne sachant pas trop ce qui m'arrivait durant ma lecture.
Une écriture pourtant assez simple voire enfantine dont certaines phrases m'ont rappelée le Mathias Malzieu des grands jours. Une fin rageante et triste à pleurer pour conclure une de ces histoires comme on en entend souvent mais qui malgré tout m'est allée droit au coeur.
L'impression d'avoir 15 ans durant 156 pages. Une parenthèse douce et amère hors du temps.
Que dire de plus ?