Publié aux USA en 2009 et traduit en français l'année suivante, "L'extravagant voyage du jeune et talenteux T.S Spivet" est le premier roman de l'écrivain américain Reif Larsen.
Ce roman a récemment fait l'objet d'une adaptation cinématographique réalisée par Jean-Pierre Jeunet.
Le jeune T(ecumseh) S(ansonnet) Spivet vit dans un ranch du Montana entouré de sa mère le Dr Clair, coléoptériste, de son père rancher et de sa soeur Gracie.
A 12 ans à peine, T.S dessine absolument tout ce qui est à sa portée dans des cahiers soigneusement classés par couleur et numérotés, qu'il s'agisse d'insectes, de cartes topologiques ou géographiques ou encore de "schémas de gens en train de faire des choses".
Lorsqu'il reçoit un coup de fil lui annonçant qu'il a remporté le prestigieux prix Baird du musée Smithsonian pour la popularisation de la science et qu'il est attendu à Washington pour prononcer un discours, T.S embarque à bord d'un train de marchandises de l'Union Pacific...
Voilà un roman pour le moins singulier autour duquel je tournais depuis sa sortie, sans pour autant me décider à l'acheter, même lors de sa parution en poche.
Il faut dire que j'étais davantage intriguée par les nombreux schémas et dessins qui parsèment le récit et par la magnifique mise en page que par l'histoire qui ne me semblait pas vraiment faite pour moi.
Lorsque j'ai aperçu ce titre dans la sélection de Babelio pour l'opération Masse critique dédiée aux littératures de l'imaginaire, je me suis dit que c'était là l'occasion de découvrir enfin ce livre.
Je ressors de cette lecture avec un avis on ne peut plus mitigé. "L'extravagant voyage du jeune et talenteux T.S Spivet" est un roman follement ambitieux (comme c'est souvent le cas des premiers romans) et vertigineux, fascinant (ou rebutant) de précision.
" Maman, est-ce que l'herbe peut me donner le sida ? avait un jour demandé Layton.
- Non, avait répondu le Dr Clair. Seulement la fièvre pourprée des Rocheuses.
Ils étaient en train de jouer à l'awalé. J'étais sur le canapé, occupé avec une de mes cartes.
- Est-ce que je peux donner le sida à l'herbe ? avait demandé Layton.
- Non, avait dit le Dr Clair
Tac tac tac avaient fait les petites pièces de verre dans les réceptacles en bois.
- Tu as déjà eu le sida, toi ?
Le Dr Clair avait levé les yeux. Qu'est-ce que c'est que toutes ces questions sur le sida, Layton ?
- Je ne sais pas, avait répondu Layton. C'est juste que je veux pas l'attraper.
Angela Ashworth a dit que c'était très dangereux et que je l'avais sûrement.
Le Dr Clair a regardé Layton. Elle tenait au creux de sa main ses pièces d'awalé.
- La prochaine fois qu'Angela Ashworth te dit quelque chose comme ça, réponds-lui que ce n'est pas parce que sa condition de petite fille dans une société qui fait peser sur ses semblables une pression démesurée afin qu'elles se conforment à certains critères physiques, émotionnels et idéologiques - pour la plupart injustifiés, malsains et tenaces - lui ôte toute confiance en elle qu'elle doit reporter sa haine injustifiée d'elle-même sur un gentil garçon comme toi.
Tu fais peut-être intrinsèquement partie du problème, mais ça ne veut pas dire que tu n'es pas un gentil garçon avec de bonnes manières, et ça ne veut absolument pas dire que tu as le sida.
- Je ne suis pas sûr de pouvoir tout me rappeler, avait répondu Layton.
- Alors, dis à Angela que sa mère est une grosse plouc alcoolique de Butte. " p.37
La première partie nous entretient de la relation entre le jeune garçon et son étrange famille qui comme l'évoque la quatrième de couverture rappelle effectivement ces familles de l'Amérique profonde tel les Hoover dans "Little Miss Sunshine".
Entre sa soeur qui rêve de devenir actrice et de quitter leur trou paumé, sa mère qui traque la cicindèle vampire, une espèce disparue, depuis des années et un père un peu rustre nostalgique du Far West, chacun vit dans son monde.
La communication entre eux s'avère minimale, d'autant que plane encore le souvenir de Layton, le frère aîné de T.S dont la mort survenue un an plus tôt a laissé chez le jeune garçon un lourd sentiment de culpabilité.
Arrivée à la seconde partie, je m'attendais à des descriptions détaillées des états et des villes parcourues par T.S, qui sait à quelques rencontres insolites, mais comme il ne quitte pas souvent le train, il est surtout question de ses réflexions de génie précoce.
Comme mentionné plus haut, le récit est annoté de schémas, dessins, tableaux, présentés comme des ramifications de la pensée de T.S mais qui m'ont hélas souvent fait l'effet de digressions ennuyeuses.
Heureusement j'ai tenu bon grâce aux passages consacrés à son arrière arrière grand-mère Emma Osterville, petit génie des sciences elle aussi, qui présente de nombreux points communs avec T.S.
Quel dommage d'ailleurs que son histoire ait été coupée avant que l'on puisse comprendre la raison de son choix de vie !
La troisième partie signe quant à elle l'arrivée de T.S à Washington où l'on ne s'attend absolument pas à accueillir un enfant. Toute la communauté scientifique du Smithsonian est en émoi et se montre avide de se servir du jeune homme pour attirer l'attention du gouvernement sur la recherche.
Mon sentiment à l'issue de cette lecture est que j'ai davantage eu l'impression de voyager dans le cerveau de T.S Spivet que de l'ouest à l'est des USA.
Certes l'immersion est totale et les détails ne manquent pas pour saisir au mieux la personnalité, les capacités et les angoisses de ce jeune garçon soucieux de donner du sens à toute chose. Si ses connaissances le hissent souvent dans le monde adulte, il reste malgré tout un enfant qui n'a pas perdu toute son insouciance (j'ai trouvé étonnant que malgré sa curiosité, il croit encore aux cigognes :))
" J'ai alors compris que les adultes, à la différence des enfants, étaient capables de s'accrocher à certains sentiments négatifs, même quand l'événement qui les avait suscités était passé depuis longtemps, même quand les cartes postales avaient été envoyées, les excuses présentées, et que tout le monde avait tourné la page.
Les adultes étaient des entasseurs pathologiques de vieilles émotions inutiles." p.304
Mais, dans la mesure où T.S catégorise et schématise pour ainsi dire tout, je me suis souvent retrouvée abrutie par un flot d'informations délivrées en continu et à l'utilité discutable.
Un roman un peu trop "fourre-tout" à mon goût et que je n'ai peut-être pas réussi à apprécier à sa juste valeur.
Je remercie Babelio de m'avoir envoyé ce roman dans le cadre de l'opération Masse Critique consacrée aux littératures de l'imaginaire.
D'autres avis : Manu - Lili Galipette - Karine:)
Et en fait, en quoi est-ce qu'il appartient aux littératures de l'Imaginaire ce roman ?
RépondreSupprimerTrès bonne question, que je me suis posée également...
SupprimerNi le livre, ni le film ne m'ont tentée, je ne regrette pas du coup!
RépondreSupprimerIl faut bien que cela arrive sinon on croulerait sous les livres et films à voir ;)
SupprimerIl ne te reste plus qu'à aller voir l'adaptation.
RépondreSupprimerOh j'ai envie de répondre que rien ne presse :)
SupprimerJ'en garde un assez bon souvenir.
RépondreSupprimerFiston a vu le film et adoré, et pour le livre, je suis bien tentée...
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