
"Un coup d'aile" regroupe deux nouvelles, "Un coup d'aile" (1923) et "La Vénitienne" (1924), issues du recueil " La Vénitienne et autres nouvelles" traduit en français en 1990 et signé de la plume de Vladimir Nabokov, écrivain américain d'origine russe célèbre pour son roman "Lolita".
Un coup d'aile nous emmène en Suisse, dans l'hôtel où séjourne Kern, un jeune homme venu trouver refuge au milieu de montagnes enneigées pour échapper à la tristesse que lui procure le suicide de son épouse survenu 6 mois plus tôt.
Au détour d'un couloir, il rencontre Isabelle qui occupe la chambre voisine à la sienne.
Un soir, alerté par un bruit anormal, il se rend dans la chambre de la jeune femme et la tire des griffes d'une étrange créature faite de plumes et d'ailes...
" Il était arrivé dans cet hôtel, dans cet endroit glacial et à la mode qu'est Zermatt pour allier les impressions d'un silence blanc avec l'agrément de connaissances faciles et chatoyantes, car la solitude complète est ce dont il avait le plus peur. Mais maintenant il avait compris que les visages des gens lui étaient également insupportables, que la neige lui provoquait des bourdonnements dans la tête, qu'il ne possédait pas cette alacrité inspirée et cette tendre obstination sans lesquelles la passion est impuissante.
Et pour Isabelle, la vie était probablement un merveilleux vol à skis, un rire impétueux, un parfum et un froid glacial." p.32
La Vénitienne rassemble dans un château anglais le colonel, propriétaire des lieux, son fils Frank venu avec son ami Simpson et le couple formé par Mr Magor - expert en peinture - et sa femme Maureen.
Au moment où le colonel lui présente sa dernière acquisition, Simpson tombe sous le charme de la toile qui présente une femme ressemblant trait pour trait à Maureen.
Troublé par le tableau, Simpson parvient à pénétrer à l'intérieur de celui-ci pour y rejoindre la Vénitienne...
" La contemplation de la beauté, qu'il s'agisse d'un coucher de soleil aux tonalités particulières, d'un visage lumineux ou d'une oeuvre d'art, nous force à nous retourner inconsciemment sur notre propre passé, à nous confronter, à confronter notre âme à la beauté parfaite et inaccessible qui nous est dévoilée." p.71
Une ambiance étrange règne sur ces deux nouvelles aux histoires complexes pimentées d'une touche fantastique et qu'on hésite à qualifier de songes ou de réalités.
Il se dégage de l'écriture de Nabokov un sens aigu de l'esthétique appuyé par un style très imagé ( nombreux adjectifs et évocations de couleurs) qui s'illustre au fil des descriptions de paysages magnifiquement envoûtants et totalement en contraste avec le mal-être et la confusion des personnages.
Comme c'est le cas dans "Lolita", les personnages se montrent violemment attirés par une femme, objet de désir inaccessible et d'autant plus fascinant qu'il menace de les faire courir à leur perte.
Si je n'ai pas totalement réussi à entrer dans l'univers de la première, je vous recommande vivement "La Vénitienne" qui démontre avec ingéniosité que les apparences peuvent parfois s'avérer trompeuses.


