9 avril 2013

Un amour noir - Joyce Carol Oates


Publié aux USA en 1990 et traduit en français en 1993, "Un amour noir" est un roman de l'écrivaine américaine Joyce Carol Oates, notamment auteure des romans "Délicieuses pourritures", "Viol, une histoire d'amour", "Premier amour" , "Reflets en eau trouble" ou plus récemment de "Le Mystérieux Mr Kidder".

En 1912, chaque habitant de Milburn aperçut l'embarcation qui descendait le long de la rivière Chautauqua, avec à son bord un homme noir et une femme blanche unis par un même amour et un même désarroi.
Bien des années plus tard, la narratrice retrace le parcours de Calla Honeystone, la mère de sa mère qui après avoir perdu ses parents, se retrouve bien vite mariée à George Freilicht avec lequel elle aura trois enfants en trois ans.
Le couple n'est pas heureux. C'est à peine si Calla s'occupe de ses enfants, préférant s'éloigner de la maison dès que possible et errer dans les bois de longues heures durant.
Le temps s'écoule inlassablement jusqu'à sa rencontre avec Tyrell Thompson, un sourcier dont la couleur de peau est loin de plaire à tout le monde...

Portrait bien étrange que celui de Calla, jeune fille rebelle encaissant les coups sans broncher durant l'enfance, mariée ensuite à un homme peu aimable auquel elle finit par céder par compassion et par orgueil.
L'occasion pour Oates d'évoquer à nouveau la question de la sexualité qui chez elle n'est jamais chose évidente, naturelle. Pas de consentement mutuel mais toujours une lutte, un rapport de force plus ou moins violent d'un roman à l'autre.
Comme toujours chez l'auteure, le récit prend place dans l'état de New-York dont les paysages vallonnés et sombres, les falaises, les chutes et courants dangereux, ces décors de légendes, ne présagent jamais rien d'heureux.
D'autant que ce début de 20ème siècle est marqué par un racisme tel que Calla et Tyrell seront rapidement traités comme des parias, soumis aux ragots puis à la vindicte populaire.
Des parents et des voisins dont on entend - en italique dans le texte comme dans "Viol une histoire d'amour" - les chuchotements au loin.

" Comment ose-t-elle : comme une vulgaire putain; de la racaille blanche; et ce nègre, noir comme le péché, comme s'il avait surgi du fin fond de la terre, c'était bien le genre à vous couper la gorge sans poser de questions, oui, et à essuyer son couteau sur vos vêtements une fois le crime commis." p.70

La fin de ce roman, qui se présente à la fois comme un ultime pied de nez et une défaite, est comme on peut s'en douter, d'une criante injustice...
J'ai éprouvé un certain mal à saisir le personnage de Calla, d'un naturel sauvage et étrange, qui semble toujours ailleurs, absente de sa vie dont elle n'a rien choisi et qui ne la concerne en rien.
En revanche, j'ai été révoltée par toute l'intolérance et la cruauté entourant son couple avec Tyrell.
Une situation qui m'a d'ailleurs renvoyée à un autre débat, toujours d'actualité...


" Car, dans ce monde, l'image que l'homme donnait de lui était acceptée à l'intérieur de certaines limites par ses propres ennemis, de même que le cheval de course de la race la plus pure - peu importe sa beauté, sa vigueur, son courage, sa rapidité - a pour limites définies l'intolérable confinement du corral ou de la prairie où ses propriétaires l'ont mis de force." p.96





5 commentaires:

  1. Jj'ai un peu de mal avec Joyce Carol Oates, c'est un peu du tout ou rien, ou j'aime ou je déteste, celui-là ne me dit rien qui vaille :)

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  2. Je sens que tu as été passionnée lors de ta lecture.

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  3. A force de lire ses romans on voit les thèmes qui reviennent, comme tu le dis la sexualité, le racisme et notamment la condition des noirs aux USA et les femmes saisies dans leurs complexité. Chaque roman rajoute une pierre à l'édifice et ce qui me passionne aussi en lisant Oates.

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  4. Une romancière que j'adore, comme tu le sais ;-)

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  5. C'est une de mes romancières préférées. Ce que j'aime chez elle , c'est que malgré les thèmes qui lui sont chers, ses histoires ne se ressemblent pas et je n'aime pas tous ses romans si bien que c'est une surprise à chaque fois. Je n'ai pas lu celui-ci.

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